" et n’allez pas croire que l’enfant qu’elle a élevée est du genre à s’affirmer féministe plus tard"
Le féminisme c’est tellement grégaire, lui a dit Yazz, franchement, même être une femme c’est dépassé aujourd’hui, à la fac nous avions une activiste non-binaire, Morgan Malenga, qui m’a ouvert les yeux, je pense que nous serons tous non-binaires à l’avenir, ni males ni femelles, qui sont d’ailleurs des prestations sexo-spécifistes, ce qui signifie que ta politique « féminine », m’man, deviendra obsolète, et tant que j’y suis, que je te dise, je suis humanitaire, ce qui se situe à un niveau beaucoup plus élevé que le féminisme
As-tu une idée de ce que ça signifie ? »
Pour Amma, c’est la consécration, ce soir sa pièce est présentée au National Theatre de Londres. Un aboutissement de près de trente années de marginalité et de travail acharné. Mais ce soir c’est un grand soir, « Les dernière Amazones du Dahomey » devraient tout arracher et ce soir surtout, dans la foule des spectateurs, il y a tant de femmes et d’hommes qui ont comptés pour elle. Il suffit alors de tirer le fil de sa vie et de toutes les autres vies et voilà un siècle de l’Histoire féminine et africaine de l’Angleterre qui se déroule.
Racisme, patriarcat, déterminisme social et toutes les luttes pour exister dans un monde qui vous refuse : Black Power + Mee too + LGBT + Blacklives Matter devient tout simplement Human Rights.
Une construction diabolique pour un roman qui parle de notre époque, une longue phrase sans point sur près de cinq cents pages, comme un plan séquences infini qui nous raconte les vies de femmes noires, hétéros ou lesbiennes ou Trans, leurs amours et leurs combats.
Un collage urbain, londonien, féministe et humaniste.
Un très grand roman qui se lit comme on regarde une série très addictive.
« je dis toujours à Mum qu’elle a épousé un patriarche
regarde les choses autrement, Amma, me répond-elle, ton père est né homme au Ghana dans les années 1920 et toi femme à Londres dans les années 1960
et alors ?
tu ne peux pas attendre de lui qu’il « te pige » comme tu dis
je lui répète qu’elle fait l’apologie du patriarcat et se rend complice d’un système qui oppresse les femmes
elle répond que les êtres humains sont complexes
je lui dis de ne pas le prendre de haut »
Fille, Femme, Autre | Bernardine Evaristo | Globe | 2 septembre
Traduit de l’anglais(Royaume-Uni) par Françoise Adelstain
480 pages 22 €