Rocancourt, Bourdin : les escrocs français et le cinéma
Pendant longtemps, j'ai confondu Frédéric Bourdin et Christophe Rocancourt ( si vous me répondez qui ca?, rassurez vous, vous pourrez quand meme suivre l'article) , et ce pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, il me semble avoir entendu parler d'eux pour la première fois au cours de la même émission, le feu talk show de Thierry Ardisson, tout le monde en parle; leur participation respective, d'après mes souvenirs, s'étant déroulés à peu de temps d'intervalle .
Mais, outre ce goût évident pour les projecteurs, ces 2 hommes présentent quelques points communs dans leurs histoires et leurs parcours.
En effet, Bourdin et Rocancourt sont tous deux des ressortissants français qui ont réussi à se faire connaitre aux Etats Unis, mais pas forcément de la meilleure des façons. Tous deux ont été accusés d'usurpation d'identité et ont été tous les deux comdamnés à des peines de prison. De plus, ces deux hommes ont visiblement connus une enfance trés difficile ( quoique pour Rocancourt, rien n'est vérifié), entre manque d'amour filial, violences et dérives, et ce parcours tortueux a pas mal été à l'origine de leurs manoeuvres frauduleuses.
Enfin, dernier point commun qui nous interesse ici, ces deux escrocs notoires ont raconté leurs histoires dans des autobiographies, et ces révélations "littéraires "(?) ont assez vite interessé les producteurs de cinéma, qui ont rapidement pris la mesure du potentiel scénaristique de leurs vies.
Cela étant, les deux n'ont pas eu le même rapport avec le cinéma, et cette divergence reflète bien la différence fondamentale entre les deux hommes.
En effet, Bourdin n'a jamais été attiré par l'appat du gain, d'ailleurs ses malversations (il se faisait passer pour des enfants disparus et prenait leur place dans leurs familles d'origine) n'ont jamais été commises dans un but lucratif;il a toujours reconnu le besoin d'affection comme motivation première, et c'est d'ailleurs ce qui le rendrait plutôt attachant.
Rocancourt, au contraire, aime l'argent, et toutes ses relations avec le milieu du 7e art ont été entachées de ce rapport brulant avec le fric. C'est ainsi que le film qu'il devait tourner avec Catherine Breillat a fini en noeud de boudin ( et non pas noeud de Bourdin), Breillat, quelque peu diminuée par un gros problème de santé, le poursuivant en justice pour abus de faiblesse et escroquerie; tandis que que le film que Thomas Langmann devait produire dès 2002, tiré de l'autobiographie de Rocancourt, n'a encore jamais vu le jour et rien ne semble penser qu'il sera tourné un jour.
En revanche, il restera bien des traces sur grand écran du destin crapuleux de Frédéric Bourdin, avec le film Le Caméléon ( du nom de son surnom), réalisé en 2010 par le metteur en scène français Jean Paul Salomé (auteur du pas terrible Belphégor) et diffusé actuellement sur Canal Plus.
Le film ne reprend pas vraiment le parcours entier de Fortin, ce qui aurait certainement plus intéressant, mais préfère se focaliser sur l'épisode le plus connu de sa vie: son usurpation d'identité commise sur un enfant de 12 ans, disparu 4 ans avant, et ses " retrouvailles " auprès de sa famille, totalement ébahie de le voir rescusiter d'on ne sait où.
Cette histoire est vraiment fascinante par les questions qu'elle soulève : comment cette famille a pu être à ce point aveuglée par ce subterfuge alors qu'il y avait des grosses différences entre les 2 garcons ( dont l'âge, Bourdin ayant déjà 24 ans) qui semblaient interdire le moindre espoir? Comment Bourdin, qui semble vite dépassé par la tournures des évenements, s'est senti avec ce sentiment d'imposture collé aux basques?
Le problème est que le film ne répond pas vraiment à ces questions et laisse Fortin à ces zones d'ombre. Très vite, ce qui interesse Jean Paul Salomé est plus la résolution de l'énigme ( autour du probable meutre de l'enfant disparu?) que l'étude de la personnalité de ce si mystérieux Frédéric Fortin...
Du coup, sur le plan du cinéma, entre Fortin et Rocancourt, entre un film qui n'a jamais été fait, et un autre qui laisse un vif sentiment d'inachevé, match nul, balle au centre...
Le Caméléon Bande-annonce 1