Le retour en grace(s) de Monsieur Chamfort
En ce 22 juin, pourquoi ne pas prolonger un peu la fameuse fête de la musique qui s'est achevée hier jusque tard dans la nuit? Pour ce faire, j'aimerais tirer un coup de chapeau à un artiste qui revient sous les feux de l'actualité ces derniers temps, après un gros passage à vide, il s'agit d'Alain Chamfort.
Lorsque j'ai découvert Alain Chamfort, dans les années 80 à l'époque du TOP 50 et d'un amour immodéré (qui s'est bien peu tarie depuis) pour la chanson française, c'était avec ses tubes de l'époque, Bambou, Chasseur d'ivoire, Bons baisers d'ici, Rendez-vous au Paradis, Traces de toi, La Fièvre dans le sang, Souris puisque c'est grave,
Et à cette époque, j'ignorais qu'il avait eu une belle carrière depuis plusieurs décennies, et à l'ombre de deux immenses stars de la chanson française; Claude François, qui lui a fait enregistrer ses premiers succès, puis Serge Gainsbourg, qui lui a écrit de nombreux textes, dont le célébrissisme Manuréva.
Cela dit, même si j'appris que bien plus tardivement la nature de ses collborations, je devinais bien plus la similitude avec l'univers de Gainsbourg que de Cloco. En effet, pour moi, Chamfort, qu'on a souvent comparé à Bryan Ferry, frappait par son dandysme et son élégance à tout crin, et ses textes cachaient frappaient par l'ironie et le double sens caché derrière . Ainsi, à quand même près de 18 balais, il m'avait fallu un peu de temps pour comprendre le sens caché Clara veut la lune (j'étais pas bien en avance, je vous le fais pas dire :o)....pour moi, Clara voulait juste que son astronaute de copain l'emmène au même endroit que Neil Amstrong, et ce, malgré l'oeil coquin d'Alain Chamfort dans son clip...
Ensuite, malgré quelques beaux morceaux qui frappaient encore par la qualité de l'écriture (L'ennemi dans la glace), Alain Chamfort a commencé à disparaitre peu à peu des radars, avant qu'on reparle de lui, suite à son licenciment, bien médiatisé, opéré par sa maison de disque Delabel, survenu peu après la sortie de son dernier album studio, Le Plaisir (2003). Il faut dire que Chamfort avait superbement communiqué sur ce licenciement , notamment dans son clip des Beaux Yeux de Laure, clip remarqué par les médias, et très diffusé, et couronner de la Victoire de la musique du meilleur vidéo-clip l'année suivante.
Finalement, sous un label indépendant, Chamfort va revenir sur le devant de la scène en 2010 avec la Vie Saint Laurent (2010), biographie musicale du couturier, qui fit date, et eu un beau succès public et surtout critique. Il faut dire que qui de mieux que ce grand dandy de la chanson française pouvait parler aussi bien de ce grand couturier?
Galvanisé par ce succès, Chamfort ( et surtout sa maison de disque) ont essayé de capitaliser sur ce retour en force, pour sortir un énième CD de duo de ses plus grandes chansons, comme tant d'autres chanteurs de sa génération (d'Adamo à Michel Dempech en passant par Gérard Lenorman) ont fait avant lui, avec un succès certain.
Alain Chamfort a eu la grande idée de revisiter ses plus beaux titres avec la jeune génération de chanteuses françaises et une équipe de producteurs - Jean-Pierre Pilot, Olivier Schultheis et William Rousseau - qui leur ont confectionné un tout nouvel écrin délicatement électronique. L'album Elles & lui, sorti le 28 mai, est certes un exercice pas neuf ( comme on vient de le voir), mais en l'occurence,c'est un disque brillamment conçu et captivant.
Elles et lui marque ainsi le retour de Chamfort dans une major avec les paramètres marketing inhérents. Le très classieux Alain reprend ses classiques, en duo avec un cortège de chanteuses (les fameuses "elles" du titre) plus ou moins connues, mais toutes ( ou presque) au grain de voix particulière
J'ai eu l'occasion de l'écouter plusieurs fois et je dois dire que cet album est une trés belle idée, tant l'objet ( sauf peut être la pochette, assez moche, vous ne trouvez pas?) est un bel écrin.
“Manu Reva” prend des tournures un peu électro, et prouve que la top Audrey Marnay chante divinement bien, tandis que “Géant” nous berce et vole à des hauteurs insoupsonnées, sous la voix impériale de Keren Ann. Et Camélia Jordana donne au Bambou une vraie grace qui n'existait pas vraiment dans l'original.
Et Souris puisque c'est grave, dont le titre pourrait me servir de leitmotiv dans la vie, prend ici des accents venant un peu d'ailleurs, dues à la superbe voix, de la non moins superbe Inna Modja :
Mais ma préférée de l'album est sans doute celle que Chamfort chante avec deux anciennes candidates d'une émission djéà un peu oubliée, X Factor : Marina D'Amico et Sarah Manesse, que le grand public avait sans doute déjà un peu perdu la trace. Il faut dire que j'ai une tendresse particulière pour ce Palais Royal, qui a toujours éveillé en moi des trésors de mélancolie liés à des amours de jeunesse, et à cette place, d'où je trainais souvent pendant mes années d'étudiants.
Leur trio est superbement mené, mais malheureusement ne l'ayant pas trouvé en vidéo, je vous laisse avec la version originale, qui, malgré un clip super cucul la praline, nous montre à quel point Monsieur Alain Chamfort méritait mon petit zoom de ce 22 juin.