Fais (pas) comme l'oiseau
Anne n’a pas d’amis, pas d’enfants, pas d’amants. Elle fait semblant de vivre. Un jour, un oiseau entre dans son appartement… « L’oiseau » ou comment revivre après un deuil… Après la perte de son enfant, Anne sombre dans une profonde solitude que plus rien n’anime, ni amis, ni amants. Elle devient transparente au monde et aux autres, jusqu’au jour où une tourterelle s’invite dans son appartement.
Les habitués de mes chroniques doivent le savoir : le samedi, j'ai pris l'habitude de croiser mes coups de griffe réguliers avec des critiques des sorties DVD reçues grace à Cinétrafic. Aujourd'hui, malheureusement, je vais faire d'une pierre deux coups, tant l'oiseau, film sorti en DVD le 5 juin, distribué par Arte Editions, ne m'a hélas pas séduit, alors que j'en attendais pas mal.
Le réalisateur Yves Caumon fait partie de ces auteurs passés à la FEMIS dont les films (Cache Cache, Amour d'enfance) qui ont les faveurs d'une certaine presse, grace à des films qui, par contre, n'ont connu qu'un succès public très confidentiel.
Dans ce troisième long-métrage, Yves Caumon questionne ces vies qui en apparence, et en apparence seulement, semblent n’avoir plus rien à perdre, ni à gagner…Comme il l'explique dans le dossier de presse" Il y a des gens qui, passé 35 ans, paraissent déjàhors du coup, entre parenthèses. Ils vont au travail, ilssont discrets, ils rentrent chez eux. On dirait des ombres. Je les appelle les fantômes des grandes villes. L’Oiseau, c’était une façon de s’approcher de l’un d’eux "
Le projet pouvait m'interesser, ayant pas mal d'affinités avec ce cinéma du réel qui cherche à suivre des personnes que l'on croise au quotidien, et que le cinéma a tendance à oublier. L'histoire du garçon qui voulait que l'on embrasse, le premier film de Philippe Harel, qui suivait à la trace un de ces antihéros du quotidien, était dans le genre une petite merveille qui m'a beaucoup marqué.
Hélas, rien de tel dans l'Oiseau, et pire, après quelques minutes de film, on se dit qu'on comprend pourquoi ces personnes de l'ombre y restent, tant leurs vies semblent, filmées ainsi, monotone et ennuyeuse.
Il faut dire que Caumon ne nous épargne aucun détail de leur quotidien: douche du soir, trjajet en bus, ramassage du courrier, avec à chaque fois, le moins de dialogues possibles et trés peu de mouvement. Encore une fois, la volonté de ne pas mettre de pathos ni de psychologie dans ce film, comme souvent dans le cinéma français empeche le spectateur d'être bouleversé par cette histoire.
Bref, indubitablement, l'ennui, lui, s'installe, et l'on regarde cet "oiseau" d'un oeil éteint, en pensant pas mal à autre chose. Il aurait fallu que le cinéaste insuffle à son récit plus de vie, plus de souffle, et quand même un peu plus de psychologie pour ne pas que l'on se sente envahir par la torpeur qui nous étreint pour ne plus nous lacher.
Et, quant à mi-film, on comprend mieux les raisons de l'état du personnage principal, on se sent coupable de ne pas se sentir plus concerné par la tragédie qu'elle a traversé. Il aurait fallu que Caumon aborde plus frontalement son sujet, et pas seulement sous le prisme de l'allégorie qui exclut pas mal de spectacteurs.
Et on pense à tous ces films sur le même sujet, de la Chambre du Fils à Rabbit Hole, tous aussi pudique, mais sans l'excès de minimalisme qui déssert ici hélas ce film.
Si Sandrine Kiberlain qui tient le film à bout de bras ( il faut dire que la caméra la suit sans relache) est assez impressionnante, elle ne permet pas de sauver l'ensemble de ce film qu'on aurait aimé apprécier, au vu de son sujet et de son ambition, mais qui s'avère malheureusement pas aussi réussi qu'il pouvait l'être sur le papier.
Dans le DVD, figure aussi une interview croisée de Sandrine Kiberlain et Yves Caumon, interessante si on veut bien tendre l'oreille tant le son est médiocre, ainsi que deux scènes coupées guère plus rythmée que le film.