Elefante Blanco : une percutante plongée dans les bidonvilles argentins!!

L’Éléphant Blanc en question ( j'ai pas fait d'espagnol, mais j'avais quand même compris le titre, doué le filou, non?) , c'est le nom d'un hôpital dont la construction n'a jamais aboutie, qui est désormais à l'abandon et qui abritent une centaine de familles, plus désoeuvrées les unes que les autres.
À travers ce projet immobilier "Elefante blanco", le réalisateur suit le parcours de deux prêtres engagés qui font oeuvre de charité dans ce bidonville,. Julián et Nicolas, deux amis de longue date, même s'ils n'ont ni la même age, ni la même facon de vivre leur vocation, se battent contre la misère des habitants de leur quartier.
Confrontés tour à tour à la violence, à la corruption ou encore à la lâcheté de leurs pairs, le film questionne leur vocation.
Pablo Trapero signe un film très tendu, à la tonalité presque documentaire avec une mise en scène, empreinte d'un réalisme social propre aux documentaires, parfaitement réussie, tant on s'empêtre à la perfection dans le dédale de cet Elephant Blanc.
Le film soulève des dizaines de questionnements différents: eglise et engagement social, corruption des sphères politiques, difficulté d’une tâche très lourde, doutes et vacillements d’hommes de foi exposés aux situations les plus extrêmes, à la maladie et même au sentiment amoureux, …
Bref, certains, comme j'ai pu lire ici et là, ont pu trouver que la barque était un peu trop chargée, moi, personnellement, j'ai été très touché par cet Elefante Blanco et justement par le fait que le traitement documentaire du film soit contrebalancé par ce tissu romanesque et très riche du scénario, ce qui permet justement de sortir du coté trop terre à terre dans lequel certaines chroniques sociales ont tendance à patauger.
Ce drame qui mélange chronique sociale et thriller d' action bénéficie en outre d'une réalisation particulièrement soignée avec notamment plusieurs magnifiques plans-séquence, sans que jamais la beauté des images ne nuise à la force du message.
Les décors du film - la carcasse de l’hôpital qui écrase les constructions branlantes des baraquements qui ont poussé autour de lui, et le nombre de figurants – notamment lors des affrontements entre police et habitants - sont très impressionnants, d’autant plus que l’on devine immédiatement qu’il ne s’agit ni de décors de cinéma, ni d’acteurs professionnels, sinon les habitants et leur quartier.
Porté en outre par un trio de comédiens professionnels habités par leur rôle et parfaitement complémentaires, avec un Jérémie Renier à l'aise dans tous les rôles, le film est avant tout un superbe écrin pour le plus grand acteur argentin actuel, Ricardo Darin, dont j'avais dejà chanté les louanges ici même sur mon blog. et qui est ici constamment impressionnant dans ce rôle de prêtre (tiens un prêtre argentin, ca ne fait pas penser à quelqu'un pile poil dans l'actu, ca?) a priori insubmersible qui va pourtant voir ses convictions ébranlées par plusieurs évenements successifs.
Oeuvre énergique, complexe, frontal, courageuse, cet Elefante Blanco, sorti depuis déjà près d'un mois et qui n'a pas vraiment convaincu les foules et la presse est un très beau drame sociétal intense et percutant qui méritait un bien meilleur sort!!