Les gens dans l'enveloppe, le formidable trois en un d'Isabelle Monnin!!
"Jean-Paul avait la patience de l’allumeur de réverbère. Pendant huit ans, chaque jour, il portait sa petite bougie dans la pénombre de Suzanne. Chaque matin, elle l’attendait, elle ne savait rien de lui, il s’aimaient déjà bien-sûr. […] Huit ans d’amour secret, non déclaré, huit ans à rêver d’elle, à s’imaginer dans ses bras, à se rêver dans ses rondeurs, à savoir sans le dire."
Les gens dans l'enveloppe, ce formidable projet d’Isabelle Monnin qui a fait une petite sensation en cette rentrée 2015, j’en avais entendu parler quelques temps avant la rentrée littéraire, et évidemment, le concept m’intéressait, et pas uniquement parce que le génialissime Alex Beaupain, ami de longue date de l’auteur, y était largement associé.
Car sincèrement, cette belle idée qu’à eu une romancière, dont j’avoue ne pas avoir entendu parler jusqu’à cette année 2015, de construire un roman puis une enquête journalistique autour de photos d’anonymes achetées un jour sur Internet et reçues dans une enveloppe d’où le titre) est vraiment de ces projets singuliers et qui donne envie d’aller voir, et c’est ainsi, que bien que je reçoive régulièrement des livres par la poste, j’ai eu envie de demander ce roman ci comme cadeau de mon dernier anniversaire.
Car pour le prix d’un roman classique, ce sont trois en un que Monnin et Beaupain nous offre : un roman, une enquête et un CD, composée par Beaupain et dont les chansons tournent autour du livre.
Originaire de la même région ( France Comté), du même milieu social et née dans les années 70, comme une petite fille présente sur de nombreuses photos figurant dans l’enveloppe, Isabelle Monnin entreprend un beau projet généalogique et sociologique, et même autobiographique, car les vies imaginées à partir de ces instantanés renvoient à la propre enfance de l’auteur, mais également l’enfance de milliers de lecteurs qui proviennent de la même génération.
C’est donc un peu comme on retrouverait un film en super 8 que le lecteur du livre suit ces "gens dans l’enveloppe", tant l’écrivain journaliste nous renvoie, avec une certaine nostalgie mais sans verser dans le pathos à une époque révolue autour de gens « ordinaires », pour nous montrer que même les personnes les plus anonymes qui soient méritent également d’avoir leurs vies consignées dans une fiction puis dans un récit non romancé.
On sait gré à l’auteur de s’adresser à son lecteur en toute honnêteté et en toute transparence, sur l’avancée de ses recherches, nous suivons pas à pas son avancée dans cette incroyable aventure
Et qu’importe si après tout l’histoire réelle constatée par Monin est plus classique et moins étonnante que le roman qui nous amenait en Argentine on aime la façon dont la pelote de laine se détricote et que les personnages fictionnels prennent vie, d’autant plus que coïncidences étranges arrivent et que les noms des personnages de fiction se confondent avec les personnages réels.
Les gens dans l’enveloppe, c'est l'histoire d’une famille de Clerval dans le Doubs, de destinées à la fois ordinaire et exceptionnelle, d'un chemin parcouru à l'envers et rembobiné jusqu'à aujourd'hui.
Le livre dépasse le simple objet concept qu’on aurait pu craindre, et cette pluridisciplinarité - musique, enquête, roman, fait tout le sel d’un projet transcendé bien évidemment aussi par la plume d’Alex Beaupain, qui dans le CD accompagnant le livre sait trouver une nouvelle fois les mots et les mélodies permettant de rendre encore plus touchant l’humanité qui tendait le projet d’Isabelle Monin (avec deux trois morceaux, notamment ceux interprétés par la délicieuse Clotilde Hesme), vraiment très beaux) .
Bref, voila une des belles créations littéraires (et musicales) de cette rentrée 2015, décidemment bien prolixe sur le plan culturel, et ce, évidemment pour notre plus grand bonheur !!