Rentrée littéraire : Patagonie route 203 : un road trip planant et atmosphérique
"Il y eut un long silence où tous les deux se regardèrent avec un mélange de curiosité et de condescendance. Parker comprit qu’il devait suivre la logique du bonhomme s’il voulait tirer la chose au clair."
Parker, chauffeur livreur mystérieux, saxophoniste et philisophe à ses heures perdues, trimballe son camion dans une région aussi aride, perdue et immense que les longues plaines de Patagonie.
Un secteur où il aime prendre son temps dans les petites routes secondaires de la région et aux lieux dont les noms- fictifs- sont aussi évocateurs que terrifiants même assez cocasses : "La pourrie", " Pampa de l'enfer" , "Mule morte" ou bien encore "Saline du désespoir"
Notre héros fuit quelque chose, mais quoi exactement? Au gré de rencontres, plus ou moins improbables- un journaliste chercheur d'épaves nazies, des garagistes au discours incensés, des policiers plus ou moins corrompus, il va aussi rencontrer l'amour au hasard d'une fête foraine avec la belle et insaissisable Maytén, qui tient la billetterie de la fête foraine.
Les choses vont se compliquer pour Parker puisque Mayten est la femme d'un type particulièrement teigneux qui pourrait avoir un peu de mal à apprécier le rapprochement entre les deux tourteraux..
" Le camion de Parker fendait l’air de sa proue, secoué par le vent, et les bâches qui couvraient la remorque se gonflaient, fouettées par une main invisible. Après une demie-journée de route, la plaine céda la place à de hautes falaises d’où l’on apercevait l’immense tapis bleu de l’océan, décoré de lignes d’écume blanche. D’un côté, c’étaient des ravins caillouteux et des plages brumeuses à l’infini, de l’autre une succession de dunes qui ondulaient comme des vagues et se déplaçaient imperceptiblement. »
Voilà un roman aussi étonnant que captivant. Eduardo Fernando Varela, scnéariste argentin pour la télévision et le cinéma, dont c'est le tout premier roman à 60 ans, nous livre un road trip planant et athmoshpérique qui fait penser à certains chefs d'oeuvre du genre comme ceux d'un certain Kenneth Cook dont on a récemment chanté les louanges.
Mais sa poésie décalée et fantaisite a aussi quelques réminissence avec la littérature de l'écrivain finlandais Arto Paasilinna notamment son roman "Le Lièvre de Vatanen ".
Un voyage onirique en camion planant et hypnotique, truffé de personnages excentriques et haut en couleurs et d’apparitions et de disparitions tout aussi cocasses.
Après la Colombie de Pilar Quintana et le Chili de Miguel Bonnefoy, la rentrée littéraire 2020 continue ses escales en Amérique du Sud avec l'étonnante Patagonie de Eduardo Fernando Varela, et ce, pour notre plus grand plaisir .
Un homme misanthrope traverse la Patagonie à bord de son camion fuyant on ne sait quoi et va faire quelques rencontres qui le changeront à jamais.. sur la base d'un road trip classique, le #patagonieroute203 s'avère être un conte hypnotisant qui mélange joliment les genres.. pic.twitter.com/FSrZfouymC
— Baz'art (@blog_bazart) August 28, 2020
« Patagonie route 203 » (La marca del viento), d’Eduardo Fernando Varela, traduit de l’espagnol (Argentine) par François Gaudry, Métailié, 358 p., 22,50 €, numérique 15 €.