Le Grand jeu: les jolis tours de passe passe de Graham Swift, grand magicien de la littérature anglaise
"Le spectacle doit continuer.Mais le faut il vraiment? Qui en décide?Quand on a t-on le droit de dire que maintenant c'est fini, qu'il n'y a plus de spectacle? De toute façon, celui ci n'avait été qu'un fragile assemblage, fait de bric et de broc pour l'été, tout au bout d'une jetée. Jack avait dit qu'il avait fait son temps, que tout serait emporté par la marée sous ses pieds. Et il avait enlacé Evie."
Eté 1959, station balnéaire de Brighton Palace: Jack Ronnie et Ewie sont les acteurs principaux du héâtre au bout de la jetée qui connaît, grâce à eux trois, sa meilleure saison estivale depuis des années.
Ronnie, un jeune magicien brillant, et Evie, sa sublime et éblouissante assistante éblouissant,, attirent le public chaque soir. A leurs cotés le fidèle Jack Robinson, artiste né, organise tout le spectacle en maitre de cérémonie d'un spectacle qui étincelle de mille feux.
À mesure que l’été progresse, les tensions hors scène entre les trois , les amours et les trahisons notamment, commencent à éclipser leur succès théâtral. Le lecteur va se rendre alors vite compte que les événements qui se sont déroulés au cours de cet été 1959 auront des conséquences durables pour leurs avenir à long et moyen terme.
Grahim Swift, grand auteur britannique- Le Pays des eaux, Le dimanche des mères- revient à plus de 70 ans avec un roman qui semble d'un classisisme un peu désuet de prime abord, avec ce qui pourrait laisser croire de prime abord à une banale histoire de triangle amoureux, mais celle-ci dévoile tous ses tours et ses richesses au fur et à mesure de son récit.
En mélangeant poésie du merveilleux et réalisme âpre, et en faisant des bons en avant et en arrière dans la chronologie, Le Grand Jeu est un de ces romans, qui comme ses protagonistes principaux , dévoilent tous ses charmes et ses artifices peu à peu .
L’écriture de Graham Swift, qui parait plutot lisse de prime abord, insiste avec grande subtilité, un peu sans en l'avoir l'air, sur ces instants de bascule où les relations entre les personnages changeront à jamais.
Et en grand maitre du roman classique, son portrait d'une Angleterre des années 60, à la fois féérique et mélancolique et sa peinture des coulisses du monde de la magie- un peu comme le fait Christopher Nolan dans son film Le Prestige- est peint avec une douce ironie typiquement british- et une maîtrise incroyable.
Assurément, un des grands romans de la rentrée étrangère de cet hiver 2021.
« Le grand jeu », Graham Swift. Traduit par France Camus-Pichon, Gallimard, 185 pages, 18 euros.
Brighton, début des années 60.. les histoires d'amour contrariées entre un magicien, son assistante et le maitre de cérémonie... Dans ce roman d'une grande élégance, Graham Swift livre une réflexion troublante sur les mauvais tours que réserve les affres de l'amour.. pic.twitter.com/ETGVFNnlmc
— Baz'art (@blog_bazart) January 16, 2021