La pierre du remords : il est comment le dernier Arnaldur Indridason ?
« Il avait vécu des journées difficiles. Il avait continué à habiter seul dans le sous-sol du quartier des Ombres où il avait passé son enfance, restant de longs moments assis, la joue appuyée sur la main, le regard fixé sur le vide étrange que la mort de son père avait laissé. Il passait des jours entiers sans franchir la porte de l’appartement et sans parler à personne. L’émotion le submergeait sans crier gare, brusquement il fondait en larmes seul, dans le noir, tour à tour anesthésié, terrifié, furieux, affligé. Sa mère l’avait encouragé à venir la rejoindre dans les fjords de l’Est où elle vivait avec son second mari et Beta, sa sœur, mais il n’imaginait pas quitter Reykjavik, son quartier et son appartement. Il n’imaginait pas vivre en province. Sa place était à Reykjavik. Il ne pouvait pas habiter ailleurs. C’était un enfant de la ville et il le revendiquait. »
Konrad regrette de ne pas avoir aidé Valborg dans ses recherches. Il n’a pas pris au sérieux la demande de la vieille dame, retrouver l’enfant qu’elle a abandonné à sa naissance, il y a près de cinquante ans. Un enfant de la honte, le fruit d’un viol, un enfant dont elle ne connait même pas le sexe.
Au début des années soixante-dix, l’époque n’était pas tendre avec les grossesses non-désirées. Mais à soixante-neuf ans, l’heure de la retraite a sonnée, Valborg veut solder son passé et oublier sa souffrance tue, elle veut retrouver son enfant et son violeur. Konrad va regretter longtemps de ne pas l’avoir écoutée, car un triste soir Valborg est assassinée dans son appartement.
Konrad, le flic à la retraite au lourd passé, je laisse aux nouveaux lecteurs le soin de découvrir sa filiation, mène l’enquête. Une triste enquête sur le triste destin d’une femme brisée.
Il faut se laisser bercer par la prose mélancolique d’Arnaldur Indridason.
Il y a du Simenon chez lui dans sa description des petites gens. Comme toujours ses romans sont des instantanés de la vie islandaise, mais jamais il n’hésite à questionner le passé de ses héros.
Violences, silences, interdits, hontes et regrets, « La pierre du remords » est un polar tragiquement féministe.