Je veux faire du cinéma : Frédéric Sojcher nous indique comment survivre dans le périlleux monde du 7e art
Frédéric Sojcher est cinéaste mais c'est aussi un professeur en pratiques du cinéma à la Sorbonne, spécialisé dans les liens entre création et production .
Cinéaste belge toujours un peu à la marge du système, Sojcher avait notamment tourné un documentaire sur des cinéastes encore plus undergrounds que lui, "Cinéastes à tout prix", ainsi qu'une fiction avec Maria De Meideiros, Hitler à Hollywood, qui a eu l'honneur d'une projection sur la croisette en Off en 2004.
Dans son nouveau livre, qui a fait pas mal parler de lui en Belgique car il a fait secouer un peu le cocotier de ce sytème de financement arbitraire , Je veux faire du cinéma, Frédéric Sojcher y dévoile le système opaque de production des films qui a cours en France et surtout en Belgique.
Franc tireur du cinéma belge francophone, Frédéric Sojcher n'hésite pas à dénoncer de l’intérieur les connivences et le manque d'objectivité qui détermine le financement des longs métrages notamment dans la Belgique qu'il connait bien avec cette commission de sélection, le CNC belge, qui le pouvoir de vie et de mort sur des projets de long métrage .
Le réalisateur n'élude rien des grandes difficultés qu'il a pu rencontrer dès qu'il a voulu se lancer dans un projet de film mais également quand il réussit enfin à en tourner un (son premier long, Regarde moi, en 2000, a connu énormément de péripéties, le cinéaste ayant été dépossédé de son film par l'acteur principal et le produtceur).
Frédéric Sojcher évoque notamment sa participation comme membre de l’avance sur recettes et n'hésite pas à donner des exemples concrets de ces petits "arrangements entre amis " et vicié jusqu'à la moëlle, qui laisse pas mal de cinéastes émergents sur le carreau.
De nombreuses personnalités du cinéma belge (dont on se rend compte à l'énumération des noms que finalement assez peu d'entre eux sont connus en France) ne sont nullement épargnés par la plume, mi rigolarde, mi amère, de l'auteur.
Cependant, malgré un côté un peu revanchard et réglement de compte que l'auteur semble clairement assumer mais qui peut en amoindrir la portée de sa charge, son livre reste également d'un certain côté une belle déclaration d’amour et de foi dans le septième art.
Je veux faire du cinéma est en effet une réfléxion plutôt inédite et pertinente sur le besoin de réinventer le système de production et de distribution des films .
Comme l'excellent critique de cinéma Antoine de Baecque le souligne dans sa préface, le livre de Frédéric Sojcher est avant tout un véritable manifeste pour tourner un film, quelque en soit le prix et l'investissement financier et personnel que l'on met avec.
Frédéric Sojcher continue plus que jamais à vouloir tourner un film et à se battre pour trouver des financements avec une envie de filmer toujours intacte malgré les feux rouges qui se dressent sur sa route.
Bref, plus que par la dimension pamphlétaire de son témoignage "Je veux faire du cinéma" touchera le cinéphile par la passion jusqu'au boutiste pour le cinéma insufflé par le réalisateur/professeur tout au long de son livre.
Je veux faire du cinéma, petit manuel de survie dans le septième art
Genèse édition. paru le 1er avril
NB: On notera la réédition simultanée d'un autre livre de Frédéric Sojcher, "Main Basse sur le film " dans lequel il relate les coulisses de son premier film Regarde moi dont le contrôle lui a complétement échappé ...