Seize printemps : le premier long de Suzanne Lindon mi figue mi raisin
C'est lors de la présentation par Thierry Frémaux lors du dernier Festival Lumière où un certain nombre de films Cannes 2020 ( ceux qui sortent désormais en salles) du film Seize Printemps que l'on a appris que la réalisatrice Suzanne Lindon était la fille de Vincent Lindon et de Sandrine Kiberlain.
Même si ni elle ni Frémaux n'ont souhaité s'apesantir sur cette prestigieuse descendance, ce qu'on peut comprendre, le détail mérite son importance surtout quand on sait que la réalistrice n'avait même pas 20 ans lorsqu'elle a commencé le tournage de son premier long métrage, ce qui est très rare dans le paysage du cinéma français.
Car, exception faite de Nathan Ambrosini qui, du haut de ses 18 ans, avait réalisé le film « Les Drapeaux de papier » sorti il y a deux ans, et qu'on avait eu la chance de rencontrer à cette occasion, les jeunes réalisaeurs français attendent souvent d'avoir fini leurs étudess ( si possible à la FEMIS) et d'avoir réalisé plusieurs courts métrages avant de se frotter à l'exercice si périlleux du long.
Concernant la jeune Suzanne Lindon et ses vingt printemps au compteur, on se rend compte qu'elle a brulé les étapes et à la vue de son film (que Thierry Frémaux avait présenté de façon très élogieuse en octobre dernier), pourvu d'un certain nombre de qualités mais qui manque un peu de consistance, on peut penser que quelques années d’expérience supplémentaies n'auraient pas forcément été superflues.
On sent bien l'amour de sa réalisatrice pour le cinéma , son film étant truffé de références d'un cinéma qu'elle aime depuis l'enfance; de L’Effrontée de Claude Miller- sa ressemblance physique avec Charlotte Gainsbourg étant d'ailleurs criante- à À nos amours de Maurice Pialat en passant par le Diabolo Menthe de Diane Kuris.
On devine aussi son goût pour d'autres arts ( quelques jolies scènes chorégraphiques en hommage à Pina Bausch) mais on a quand même l'impression que la jeune réalisatrice n'a pas grand chose à nous raconter et qu'un court métrage aurait largement suffi .
Loin des oeuvres bavardes et traversées d'une grande intensité, Seize printemps privilégie une atmosphère minimaliste, pleine de douceurs et d'ellipses; intention louable s'il en est, mais qui donne quand même le sentiment net de manquer de consistance..
Aucune réflexion sociale ou de dimension psychologique dans cette histoire d'une jeune fille ( la réalisatrice elle même) qui vit dans une ambiance familiale aimante et qui va tomber amoureuse d'un comédien bien plus âgé qu'elle.
Rien de scabreux ou de sulfureux non plus dans cette histoire d'amour entre un trentenaire et une adolescente- on n'est pas chez Nabokov- ; Suzanne Lindon optant pour la suggestion et les non dits sauf que là encore, le film, à ne pas vaiment traiter son sujet, s'avère rapidement répétitif .
Son rythme languissant provoque une indolence qui pourra vite lasser le spectateur, qui attend en vain une émotion qu'il était venu chercher.
Certains seront sans doute charmés par la poésie de l'ensemble ( et la jolie bande son de Vincent Delerm), d'autres trouveront le temps long alors que le film ne dépasse pas l'heure vingt..
Bref, Suzanne Lindon, qui joue, réalise et a écrit le scénario de son premier long, n'a sans doute eu les épaules pas assez larges pour un tel projet.
Son premier film n'a pas la force des premiers Xavier Dolan mais là, n'était sans doute pas son intention non plus .
A l'heure où les bons films sont particulièrement présents à l'affiche, peu de chance que ce Seize Printemps se démarque largement du lot, à moins que le nom des Lindon suffisent à attirer l'attention de certains curieux.