📚 RENTRÉE LITTÉRAIRE AOÛT 2022 : Dessous les roses de Olivier Adam 🖊
— Tu crois qu’il va venir ? m’a demandé Antoine en s’allumant une cigarette.
J’ai haussé les épaules. Avec Paul comment savoir ? Il n’en faisait toujours qu’à sa tête. Se souciait peu des convenances. Considérait n’avoir aucune obligation envers qui que ce soit. Et surtout pas envers sa famille, qu’il avait laminée de film en film, de pièce en pièce, même s’il s’en défendait.
— En tout cas, a repris mon frère, si demain il s’avise de se lever pour parler de papa, je te jure, je le défonce.
— Ah ouais ? a fait une voix derrière nous. Je serais curieux de savoir comment tu comptes t’y prendre…
Antoine a sursauté. Je me suis retournée. Paul se tenait là , dans l’obscurité, son sac à la main. Nous n’avions pas entendu grincer la grille. J’ignore comment il s’y prenait. Ce portillon couinait depuis toujours. Aucun dégrippant, aucun type d’huile n’avait jamais réussi à le calmer. Mais Paul parvenait à le pousser sans lui arracher le moindre miaulement.
Claire, Antoine et Paul sont les membres d'une même fratrie , et à la mort de leur père, ils se retrouvent autour de leur mère et se retrouvent avec un tas à régler entre eux et envers eux-mêmes
En quelques soirs, ils vont chercher à cerner ce qui a creusé la distance qui les sépare aujourd’hui.: c'est l'heure où les rancœurs sont dévoilées au grand jours , les non dits explosés en vol et les jalousies étalées et se poser les questions qu'on osait pas poser à voix haute : pourquoi n'a ton pas vécu la même enfance ? Pourquoi détester autant ce père ? Pourquoi faire commerce de ses névroses familiales?
Au cours d'un huis clos rigoureusement découpé en plusieurs actes, Olivier Adam nous plonge avec justesse et intensité dans l'intimité de ces personnages à la dérive, où le lien du sang est surtout prétexte à haine et déchirement
Olivier Adam s'avère toujours aussi habile à explorer les pudeurs, les petits arrangements, les souffrances individuelles, les fêlures intérieures et les différences de perception.
Il s'attache aussi à démontrer, comment, une fois devenus adultes, il faut continuer à faire vivre la fratrie, dépasser les rancœurs, accepter ce que l’autre est devenu, accepter l’éloignement.
Émouvant et sensible, son dernier roman, un peu trop court et parfois un peu trop à la surface des choses n'atteint néanmoins pas totalement la force de ses plus grands romans et même celle de son précédent livre, sans doute plus ambitieux que celui ci qui reste sans doute un peu trop dans sa zone de confort.
Dessous les roses
Flammarion