Deux publications pour retrouver Sempé tel qu'on l'aime
Le dessinateur Jean-Jacques Sempé, l'orfèvre d'une poésie tendre, disparu en aout dernier, a enchanté le monde avec ses dessins drôles et poétiques, publiés dans la presse et rassemblés dans des albums.
Sempé à New York
À partir de 1978, une centaine des dessins de Sempé ont fait la couverture du journal The New Yorker.
Ce beau livre réédité chez Denoel à l'occasion de sa disparition regroupe toutes les couvertures dessinées par Sempé au fil des années pour le magazine le New Yorker.Sans être une spécialiste de Sempé mais ses illustrations sont vite reconnaissables on y retrouve avec grand plaisir son trait, sa façon de voir le monde, les hommes, New York ici avec poésie mais aussi lucidité. Sans mot, le dessinateur suggère la petitesse de l’homme par rapport à la nature, sa solitude aussi parfois, son goût pour la musique et pour la danse (qui revient régulièrement dans les sujets qu’il dessine). L’humour est aussi présent dans pas mal de couvertures.
On a été aussi très sensible à la composition de ses dessins, aux couleurs qu’il choisit et qu’il marie. Un long entretien avec Marc Carpentier revient sur son expérience au New Yorker, sur le temps qu’il a passé à Neww York, sur sa vie de dessinateur. Cela laisse transparaitre une attitude humble malgré le fait qu’il soit un dessinateur très connu et reconnu.
Sempé à New York est aussi une façon de découvrir la ville et ses habitants alors on ne le dévore pas mais j’en déguste quelques pages chaque soir avec un réel plaisir.
Sempé à New York
Première parution en 2009 Parution : 06-10-2022
"Garder le cap". Sous la plume de Sempé, il y a un peu d’ironie dans cette formule offensive. Car, on le sait depuis un demi-siècle, ses petits bonshommes sont pleins d’espoirs et de projets que, sans doute, ils n’ont jamais réalisé et ne réaliseront jamais. C'est ce qui les rend si humains et attachants.
Sélection de planches parues dans le magazine depuis les années 1990, ce recueil, le dernier publié par l'auteur de son vivant, montre à nouveau combien l’art de Sempé, alliant fausse simplicité et vraie précision, est indémodable.
Tournant en dérision les travers de ses contemporains, leurs grandes espérances et leurs petites vanités, l’artiste sait aussi avoir de la tendresse pour leur incompréhension du monde et leur détresse existentielle telle cette vieille dame qui allume un drôle de cierge avec un nœud au milieu, dans une église, en avouant : "J’ai acheté ça dans un magasin rigolo, mais c’est uniquement pour que cette fois on n’oublie pas ma requête"
Sans doute, ce sont d'ailleurs ces illustrations sur la religion qui sont les plus droles, celles qui mettent en scène de fantaisistes bigotes aux dialogues savoureux: «Que vous n'existiez pas soit. Mais à ce point, c'est indécent», lance l'une d'entre elles au Seigneur.
On se rend compte ainsi à quel point La drôlerie, la tendresse de Sempé viennent tout autant de son trait à la finesse unique que de ses légendes qui, elles cultivent le contraste et l’absurde!
Garder le cap, Sempé, Folio, octobre 2022