Le Présage, de Peter Farris : un roman noir brillant qui flirte étrangement avec le réel
“Les gens ne veulent pas des faits. Ils veulent être remués. Il leur faut des idées qui tiennent sur un autocollant de voiture pour qu’ils puissent hocher la tête et dire, “bien parlé”. Ainsi va le monde : les gens choisissent la vérité qu’ils veulent, et au diable le reste."
Dans la réserve naturelle de la Lokutta, le cadavre d'une jeune femme est retrouvé. Alors que tous les habitants se demandent bien qui est cette mystérieuse inconnue, Toxey, jeune noir qui se reverait photographe professionnel, se retrouve mêlé malgré lui à cette sinistre affaire. Au même moment, un homme d'affaires aux intentions peu louables décide de se lancer en politique.
Peter Farris, l'auteur des excellents Le diable en personne» et «Les mangeurs d’argile» n'en finit plus de livrer des bon gros romans poisseux dans la grande tradition littéraire du Deep South.
Le présage, son dernier roman en date que Farris est venu défendre il y a quelques semaines à Quais du Polar, mêle avec une belle habileté une enquête riche en rebondissements et une réflexion politique très intéressante sur la montée en puissance des mouvements populistes ancrés au cœur même de l’Amérique dite "profonde".
Dans ce roman captivant de bout en bout, porté par une construction narrative ambitieuse et menée avec brio, la fiction flirte étrangement avec le réel.
Les dérives du pouvoir politique incarné par Elder Reese évoquent forcément les affres de Donald Trump, tout aussi outrancier et abject que son double de papier, exception faite dans le récit de Farris, les folles ambitions de cet homme politique prêt à tout sont soudainement mises à mal par la découverte d’un corps d'une femme enceinte retrouvée sans vie dans la réserve naturelle de Mercy Oaks, dont il est propriétaire des bois attenants.
Le présage est un roman noir particulièrement brillant au style impeccable, qui jongle habilement entre passé et présent et qui surtout réussit à éclairer les multiples visages sectaires des maux (corruption, lobby des armes, racisme...) qui rongent les États-Unis.
Sans aucun doute, et de l'avis même de l'auteur qu'on a eu la chance de croiser sur Lyon, le meilleur roman de son auteur !
Le Présage, de Peter Farris, traduit par Anatole Pons-Reumaux, Éditions Gallmeister, 496 pages, 24,90 euros.