"Incendies" a t-il mis le feu dans mon top 10 de l'année?
Allez, dernière ligne droite avant la fin d'année 2011. Et, comme je le disais déja dans mon billet sur Une Séparation, c'est le moment ou jamais de voir les grands films de l'année qui ont de bonnes chances de me séduire, afin qu'ils aient la possibilité de bouleverser mon bilan cinématographique de l'année en cours.
Les dernières années, vu le faible nombre de films que j'avais pu voir, mon classement était peu parlant, mais, cette année, vu que j'ai augmenté mes passages au cinéma et que j'ai pris un abonnement à un vidéo club passant toutes les nouveautés en film d'auteur, j'ai du atteindre les 60 films... ce qui, sur les plus de 500 films sortis dans l'année est certes peu, mais quand même assez significatif tout de même.
Bref, il me manque quand même pas mal de films importants sortis cette année, mais il y en a un que je ne voulais pas du tout rater, vu le sujet, et tout le battage qui avait entouré sa sortie. Il s'agit d'Incendies, adaptation d'une pièce de Wajdi Mouawad, que je n'ai pas vue, mais qui a la réputation d'être superbe et également inadaptable.
Denis Villeneuve, cinéaste québécois moins connu que Denis Arcand, mais tout aussi doué à mes yeux (j'ai pu voir deux de ses films) a néanmoins tenté le pari de tirer de cette pièce une oeuvre cinématographique.
Ce qui est certain, c'est que cette pièce et ce film sont portés par une ambition énorme, celle de méler une histoire familiale et l'histoire d'un pays, le Liban, à travers les époques, les conflits, et les continents. L'histoire se passe ainsi à cheval entre le Liban et le Québec. En effet, c'est dans ce pays que des jumeaux, Jeanne et Simon Marwan, se voient remettre à la mort de Nawal, leur mère, son testament : il contient deux enveloppes, l’une adressée à leur père, qu’ils croyaient mort, l’autre à un frère, dont ils ignorent l’existence. Quand ils auront remis ces lettres, leur écrit-elle, elle pourra être inhumée la face tournée vers le ciel, sous une plaque gravée à son nom. Si Simon veut tourner la page du passé, Jeanne décide d'aller au Moyen Orient pour repartir sur les traces de cette mère qu'elle connaissait à la fois si bien et si mal.
Et le film passe donc allégrement d'une époque à l'autre, du Liban des années 60 à celle d'aujourd'hui, pays profondément marqué par les conflits permanents. Et ce n'est qu'au bout d'une longue quête que les jumeaux ( Simon viendra ensuite, un peu malgré lui, preter main forte à sa soeur) auront résolu le mystère de leurs origines. Un mystère d'ailleurs absolument renversant et totalement inattendu, que l'on apprend que dans les dernières minutes du film.
Pour ma part, je le connaissais la clé de l'intrigue avant de voir le film, car ma mère, qui avait détesté la fin, avait pris soin de me la raconter (perverse cette moman, non?), lors de la sortie du film sur grand écran. Si, un an après, je ne m'en rappellais plus tant que cela, au fur et à mesure du film, elle m'est revenue à la surface. En tout cas, personnellement, si cette résolution finale peut être un peu exagérée, pour ma part, elle m'a semblé être une superbe idée, dans la plus pure tradition de la tragédie shakesparienne, et elle a réhaussé totalement le reste du film.
Car j'ai trouvé quand même l'oeuvre non exempte de quelques scories : le film met selon moi une bonne demi heure à démarrer réellement, certains passages sur l'histoire du Liban ne m'ont pas paru suffisament clairs pour tous ceux qui ne sont pas familiers avec les origines de ce conflit, et je n'ai pas bien compris les motivations de Nawal, qui passe d'un camp à l'autre trop soudainement pour que l'on puisse saisir la portée réelle de ses agissements. Le film donne en fait l'impression de vouloir jouer sur les deux tableaux, film presque documentaire sur les ravages d'un pays en ruine, et fiction trés romanesque aux habiles rebondissements, et l'équilibre entre les deux n'est pas toujours parfait.
Mais le film a toutefois l'immense mérite de soulever d'importantes questions dont la principale est "Comment vivre avec son passé" ? Et également comment les jeunes générations peuvent comprendre les guerres civiles d'un pays qui n'est pas le leur?
Malgré les réserves dont je viens de parler, il est évident que Le film embrase le passé et le présent dans un même souffle avec une mise en scène souvent inspirée, et qui surtout ne laisse jamais penser qu'il s'agit d'une pièce de théatre à l'origine (pas comme dans Potiche par ex) . Et, au risque de me répeter, la révélation finale nous laisse totalement KO debout, KO accentué par la magnifique chanson de Radiohead qui ouvre et cloture le film. Alors, sans doute qu'Incendies ne figurera pas dans mon Top 10 final, mais il reste une oeuvre majeure de cette année 2011, à voir pout tout ceux et celles qui aiment sortir du cinéma le coeur vibrant, et qui aiment également faire connaissances avec des paysages et des personnages que l'on fréquente peu dans la vie de tous les jours.