Vera Kaplan : Laurent Sagalovitsch nous raconte une destinée extraordinaire..
On connait la plume de Laurent Sagalovitsch, notamment parce qu'il a été critique littéraire à Libération, aux Inrockuptibles, à L’Évènement du jeudi. et anime depuis juillet 2011 un blog mordant et percutant sur l'actualité, plutôt politique et qu'on peut trouver sur slate.fr : You will never hate alone.
Mais Sagalovitsch est aussi un romancier réputé, dont les romans sont souvent traversés par la question de la judaicité, ce que son dernier roman, Vera Kaplan, paru dans le cadre de la rentrée littéraire de 2016 illustre de façon édifiante.
En effet, dans ce récit inspiré du destin de Stella Goldschlag, Laurent Sagalovitsch s'empare sans complaisance du destin d'une réprouvée pour faire le portrait d'une victime devenue monstre, chez qui la pulsion de vie s’est montrée plus forte que la conscience.
Un roman dur et terrible qui décortique comment on peu devenir un monstre..en 150 pages. et un éclairage sur une partie de l'histoire assez peu connue avec ces juifs qui ont collaboré avec les nazis pendant la 2ème guerre. mondiale pour sauver leurs peaux..
Une lecture assez éprouvant qui fait un peu penser au dilemme “du choix de Sophie” même si le destin est différente, et dont Michel nous parle immédiatement :
« Chaque fois je joue l’étonnée. Comment est-ce possible ? Des Juifs qui dénoncent d’autres Juifs ? Mais c’est impensable ! Ils me donnent des noms, des preuves, mais jamais ils ne doutent que je suis l’une d’eux. Parce que je suis une femme, je suppose. Parce que je suis belle. Parce qu’ils gardent de moi le souvenir d’une bonne camarade. Ils me font pitié. Ils sont tellement bêtes et naïfs. Ce n’est pas ma faute s’ils se montrent aussi stupides. »
Un jeune homme de trente ans, dont la mère est morte depuis peu, reçoit un colis en provenance d’Allemagne. Des cahiers d’écolier remplis d’une écriture fines et la lettre d’un notaire. .Il est l’héritier de sa grand-mère dont il n’a jamais connu l’existence. Le jeune homme va se plonger dans son histoire familiale et rentrer dans la peau d’un monstre.
Un livre coup de poing, un témoignage terrible sur la condition des juifs qui se terrent à Berlin pendant la deuxième guerre mondiale. Toute l’horreur des hommes et des femmes devenus bourreaux et victimes dans ce journal écrit à la première personne. Un témoignage librement inspiré par le destin véritable de Stella Goldschlag qui pour sauver ses parents et sa propre vie dénonça d’autres Juifs par centaines.
Vera Kaplan a eu un destin extraordinaire parce qu’elle a traversé une époque extraordinaire, l’auteur explique mais n’excuse pas.
La plume de Laurent Sagalovisch est sèche et terriblement efficace, impossible de lâcher ce court récit.
MD