Sélectionné à "Un Certain Regard" lors du dernier festival de Cannes et lauréat de la prestigieuse Caméra d'or, "Girl " de Lucas Dhont est, pour l'avoir vu en avant-première dès le mois de septembre, notre coup de cœur inattendu de cette rentrée 2018.
Depuis sa projection en mai dernier, le rapprochement entre Lukas Dhont, l'auteur de ce premier film belge d’une maturité étonnante, et le cinéma de Xavier Dolan, découvert également à Cannes avant ses trente ans a souvent été un peu trop vite fait.
En effet, à part des thématiques proches (sur l'identité et le genre) la démarche de Dhont est assez différente de celle de Dolan, en portant un regard plein de justesse sur une situation complexe tout en remettant en cause le lien qu’établit la société entre sexe et genre.
Girl est avant tout un film luminueux et simple qui permet de montrer la lutte intérieure- et physique à travers le prisme de la danse- d’une jeune héroïne, capable de mettre son corps en danger pour pouvoir devenir la personne qu’elle veut être.
Par la nécessité de faire réflechir le spectateur sur sa propre perception du genre, de ce qui est féminin et masculin, mais surtout en parvenant à si bien montrer la lutte intérieure d’une jeune héroïne, capable de mettre son corps en danger pour pouvoir devenir la personne qu’elle veut être, Girl interroge et interpelle le spectateur longtemps après avoir quitté la salle.
Lukas Dhont fait montre, à l'égard de son personnage et de son formidable acteur Victor Polster, éblouissant en jeune en recherche d'identité et ses souffrances, d'un grand respect et d'une grande intégrité, avec un refus admirable de céder à tout pathos.
Le jeune cinéaste parvient surtout à écarter tout sensationnalisme (contrairement par exemple à Capharnaum, autre film cannois qui est en ce moment sur les écrans) dans un pari qui force totalement l'admiration.
Les personnages sont, fait rare dans un film sur la question de l'identité sexuelle et du changement de sexe, plein de bienveillance : on pense notamment au personnage du père joué par Arieh Worthalter, (dans un des plus beaux seconds rôles vus au cinéma cette année), un père toujours à l’écoute et dévoué à suivre son enfant où il le désire sur le chemin de l’épanouissement.
Avec une mise en scène aussi organique que sensitive, Girl, qui est sans doute un des plus beaux films de cette année 2018, évite à chaque fois la larme facile mais réussit la prouesse de faire chavirer le spectateur dans un même élan.
Et le public- le film vient de dépasser à ce jour les 130 000 entrées, ce qui est formidable pour ce type de film- semble lui aussi tomber sous le charme de ce très beau personnage.