Critique cinéma /Notre dame: la comédie poétique et visionnaire de Valérie Donzelli !
Journée spéciale "architecture au féminin" ce jeudi. Commençons les hostilités avec notre critique d'un long métrage qui sort dans deux semaines et qui nous a touché par sa folie douce et son audace.
Il est l'oeuvre de la décapante Valérie Donzelli qui revient en force sur nos écrans.
Maud Crayon , mère de deux enfants est tiraillée entre deux hommes , son ancien amour de jeunesse qui ressurgit soudainement dans sa vie et son ex, accessoirement aussi le père de ses enfants qui a tendance à un peu trop la coller.
Professionnellement parlant, ce n'était pas non plus la joie, du moins avant qu'elle ne soit sélectionnée malgré elle par la mairie de Paris pour travailler sur un projet d'architecture pour rénover le parvis de la Cathédrale Notre Dame (pas encore endeuillée par le sinistre incendie du 15 avril dernier, le film étant alors en plein montage à ce moment là) .
Si le titre du film fait évidemment résonnance avec la cathédrale meurtrie, la réalisatrice, que nous avons rencontré il y a quelques jours à peine sur Lyon, refuse le procès pour opportunisme qu'on pourrait lui intenter.
En effet, elle insiste sur le fait que le "dame", écrit sans majuscule et que le titre de son film renvoie aussi et avant tout aux différents portraits de la femme d'aujourd'hui que montre Valérie Donzelli; ces femmes qui doivent assumer énormément de responsabilités sans jamais se plaindre.
Tout juste dix ans après "La reine des pomme" et après "Marguerite et Julien", film très ambitieux mais qui aura connu un échec cuisant, Valérie Donzelli revient à un cinéma très burlesque et très fantaisiste , où un vent de folie douce parcourt ce long métrage, tout en rupture de tons et narratives.
La réalisatrice du sublime "La guerre est déclarée" propose au spectateur qui voudra bien le suivre dans son tourbillon une comédie virevoltante, toute en énergie et en tourbillon auprès d'une quadragénaire qui court dans tous les sens pour répondre à tous les défis et épreuves qu'elle traverse .
Maud Crayon est un personnage dépassée par tous les événements qui l'entourent.
Sa vie amoureuse, sa vie de mère, sa vie d'architecte, son rapport au monde, tout s'avère être un frein à des ambitions qu'elle a du mal à endiguer et à assumer.
Malgré un manque criant de confiance en elle, Maud- que la réalisatrice incarne avec son épatante singularité- ne manque pas de ressources.
Généreuse et d'une humeur jamais altérée par les événements contraires et les soubresauts de sa vie, Maud construit celle ci joyeusement et à sa façon, poétique et décalée.
Pour écrire le scénario du film, Valérie Donzelli a pu compter sur l'appui de Benjamin Charbit, l'un des auteurs d'"En liberté! "de Salvadori
Nous ne serons pas surpris d'y retrouver cette même vivacité au service d'une histoire un peu folle qui semble partir dans tous les sens, mais qui est finalement assez bien charpenté..
Dans "Notre dame" , les maquettes d'architecture s'envolent en pleine nuit, les gens se filent des claques sans raison, on se met à chanter dans un cinéma, des journalistes s'improvisent avocats : Valérie Donzelli ose tout sans se soucier des convenances et cela fait un bien fou.
Certes, cet équilibre entre fantaisie débridée et chronique sociale ne fonctionne pas toujours totalement avec quelques séquences qui tombent à plat, mais l'ensemble dégage un charme et une bonne humeur totalement communicative qui fait du bien en ces temps troubles et troublés .
Mais le plaisir que l'on ressent devant le dernier film réalisé par Miss Donzelli vient aussi ( surtout?) du côté choral de l'oeuvre.
Gravitent en effet autour de Maud une rimbambelle de personnages bien délurés et aussi agaçants qu' attachants : Valérie Donzelli s'est en effet entourée d'un casting assez incroyable pour ce film choral où même les troisièmes rôles sont joués par d'excellents acteurs.
De Pierre Deladonchamps en amour de jeunesse charismatique et bienveillant, en passant par Thomas Siméca en looser parasite en passant par Bouli Lanners collègue bonne pâte , Samir Guesmi qu'on voit enfin dans un rôle de méchant, sans oublier une Isabelle Candelier qui pourrait faire penser à une maire de Paris bien actuelle, toute la troupe s'en donne à coeur joie et semble énormément s'amuser...
Une fantaisie idéale pour les fêtes de fin d'année, un bonbon légerement acidulé qu'on savoure longuement...
Allez-y, vous ne le regretterez pas !
Notre dame/Valérie Donzelli, AU CINÉMA LE 18 DÉCEMBRE 2019