Ne nous voilons (sic) pas la face : la fiction française est toujours un peu frileuse pour aborder, dans ses scénarios, les thématiques communautaires et religieuses, surtout sous l'angle de la comédie.
Dernièrement, seuls quelques longs métrages comme Coexister de Fabrice Eboué ou "La lutte des classes" de Michel Leclerc auront réussi à embrasser ces thématiques comme la laïcité ou les conflits entre religion, avec l'ambition de traiter ces sujets avec autant de légereté que de profondeur.
Le réalisateur et producteur bordelais Zangro connait bien ce problème, lui qui s'escrime depuis une dizaine d'années à faire accepter ces thèmes de société et qui a pu se heurter aux refus des diffuseurs .
Il a pu vérifier que les thématiques d’identité, de mixité et d’intégration crispaient un peu ses interlocuteurs, surtout quand comme lui, on a la volonté d’associer islam et humour.
Sa comédie "Ramdam", tournée l'an dernier dans la région bordelaise, était au départ une série prévue sur France TV - dont le pilote avait été récompensé au festival de la Rochelle et devant les difficultés rencontrées, elle est finalement devenu un téléfilm produit cette fois-ci notamment par Arte qui a acté sa diffusion. à la fin de la semaine ( et déjà sur le replay de la chaine)
Centré sur le conflit générationnel entre un père et son fils dans un village du Sud-Ouest et où le père, président du club de rugby veut faire remplacer la mosquée par une discothèque ( plutôt un club house comme il le dit lui même), la fiction de Zangro aborde avec beaucoup de finesse et de dérision les relations entre la société française et Islam, et les relations interculturelles entre France et Maghreb.
Le point de départ de l'intrigue tourne autour d' Amine, brillant professeur d’Histoire des civilisations à l’université de Bordeaux, qui va se retrouver un peu contre son gré devenir imam de la mosquée de sa commune natale, juste par opposition un peu vaine à son père dont il fustige les pertes de valeur morales.
Car autant qu'une réflexion amusée et pertinente sur les relations ambivalentes presque schizophrénique des rapports que la République entretient avec l’islamentre la république Laique et la liberté de culte, "Ramdam" est avant tout la peinture d'une relation filiale tout aussi compliquée entre un père et son fils, surtout lorsque la transmission entre les générations d’une identité plurielle n’est pas vécue par tous de la même manière.
Drôle et tendre à la fois, portée dans le rôle principal par le toujours épatant et charismatique Lyes Salem ( inoubliable acteur et réalisateur de la superbe fresque L’Oranais, et bientôt au cinéma dans "Abou Leia" et entouré d'une kyrielle d'acteurs méditerannéens chaleureux et investis , "Ramdam", qui se revendique comme étant la première comédie filmée dans une mosquée réussit largement son objectif, celui de décrisper et de rassembler autour d'un sujet toujours un peu tabou..
Un peu le contraire de "Comment j'ai fait au bon dieu, en fait" ...
Pour voir le film sur le replay d'arte :
