Critique film : La plus précieuse des marchandises : le conte humaniste et délicat de Michel Hazanavicius
“Il était une fois, dans un grand bois, un pauvre bûcheron et une pauvre bûcheronne”
Dans un grand bois, vivent un pauvre bûcheron et une pauvre bûcheronne en mal d'enfant. Tout près, une ligne de chemins de fer où des trains passent régulièrement... Tout autour, la guerre.
Quand Michel Hazanavicus adapte le conte de Jean-Claude Grumberg : La plus précieuse des marchandises, le projet peut étonner de prime abord
D’abord diplômé des Beaux-Arts, Michel Hazanavicius a lui-même dessiné les croquis des personnages en amont du processus d’animation. Avant de concevoir son découpage technique, le cinéaste a procédé à un tournage de deux semaines en studio, avec de vrais acteurs et décors, de manière à établir cadres et mouvements.
Ce conte est un conte pour adultes, qui revient sur une des pires catastrophes qui se soient abattues sur l’humanité: la perte, justement, de cette humanite.
En écrivant ce texte sous forme de conte, Grumberg a réussi quelque chose de puissant, et d'inoubliable. Il a su avec un récit simple, concis, restituer l'impensable, l'inimaginable. Il nous livre un condensé de toutes les atrocités, l'inhumanité et la folie dont les hommes ont été capables.
Mais il y a aussi et c'est la force de ce conte, cette magnifique histoire d'amour que Jean-Claude Grumberg rend avec tant de beauté et de poésie, poésie concentrée dans ce titre où un enfant devient "La plus précieuse des marchandises".
L’histoire de ce bébé jeté d’un train de déportés par son père et recueilli par un couple de bûcherons en Pologne est magnifié d'emblée par la voix du narrateur Jean-Louis Trintignant la plus belle voix du cinéma français
Avec La plus précieuse des marchandises, Michel Hazanavicius s’essaye avec grande réussite à l’animation et livre un film aussi touchant qu’important, qui se présente comme un conte, tout en faisant un lien poignant avec la Seconde Guerre mondiale.
L'allusion au cri d'Edward Munch pour symboliser l'horreur des camps est également glaçant. Le film est une réussite plastique certaine. Les nombreuses séquences dans la forêt enneigée, avec voile de brume ou de flocons, sont splendides. Visuellement, le film possède un réalisme minimaliste, un dépouillement qui sied bien au sujet
Michel Hazanavicus affirme qu'il n'a pas voulu faire un film sur la Shoah mais un film sur les justes (et les injustes, par extension). Ce bijou de conte animé dessiné par lui, rappelle, si besoin, la complexité du monde, et sa beauté cachée, parfois, dans le cœur des hommes
Ne ratez pas à sa sortie en salles ce conte humaniste et subtil.
Film présenté ce mercredi 16 octobre au Lumière Terreaux dans le cadre du festival Lumière
LA PLUS PRÉCIEUSE DES MARCHANDISES
de Michel Hazanavicius
Avec les voix de Dominique Blanc, Denis Podalydès, Grégory Gadebois, Jean-Louis Trintignant
Réalisation : Michel Hazanavicius
Scénario : Michel Hazanavicius d’après l’œuvre de Jean-Claude Grumberg
Musique : Alexandre Desplat
Production : Ex Nihilo, Les compagnons du cinéma
Distribution et ventes internationales : StudioCanal
Sortie le 20 novembre 2024
Présentation du film par le réalisateur au cinéma Lumière Terreaux le 16 octobre dans le cadre du Festival Lumière 2024
Crédit photo: Festival Lumière