Rabia ; critique du film de Mareike Engelhardt
Insatisfaites de leur vie en France, Jessica et son amie Laïla partent en Syrie rejoindre Daech.
Elles ont 19 ans et sont persuadées qu'elles vont épouser un beau combattant rencontré via Internet qui les assure de son amour et lui donner de beaux enfants.
Le sujet, à la fois abrasif et passionnant, des français qui partent faire le Djihad pour Daesh et l’État islamique est peu traité au cinéma.
À travers le parcours de jeunes femmes embrigadées par Daech, la réalisatrice allemande interroge la notion de mal et le malaise d'une jeunesse sans repère
Elle utilise pour cela l'idée ingénieuse d'un huis-clos dans un centre de formation pour ces femmes qui se révèlera plus une maison close avec des femmes mises à disposition sexuelle des combattants comme « épouses »
Cet angle là lui permet d’aborder le sujet du Djihad sous un angle purement féminin puisque cela concerne uniquement des jeunes femmes.
Inspirée par des témoignages et faits réels, Mareike Engelhardt met en lumière la mécanique de la radicalisation sous l' angle d’un enfermement mental et d’un effacement progressif de l’identité et de son libre arbitre.
On vit cette plongée terrifiante dans cette prison qui ne dit pas son nom en apnée, terrifié par le sort de ces filles qui se font maltraiter, humilier, lyncher..
Menée avec un rythme dépourvu de temps mort, on suit pas à pas le destin de Jessica, tragique tombée sous le joug et l'emprise de Madame, la charismatique directrice qui tient les lieux d’une main de fer. Cette dernière est jouée par la toujours formidable Lubna Azabal qui empoigne ce rôle de gérante des lieux- loin de celui qu'elle tenait dans le récent « Amal, un esprit libre » avec grâce et talent.
Portée à bout de souffle par la prestation incroyable par Megan Northam, aussi crédible en jeune brebis naïve qu'en tortionnaire sans foi ni loi, le voyage de Jessica symbolise la puissance insidieuse de la manipulation psychologique.
Mareike Engelhardt livre une réflexion palpitante et qui ne laisse pas indemne sur les mécanismes de l’endoctrinement, sans jamais tomber dans la démonstration ou la moralisation facile.
Rabia avec Megan Northam, Lubna Azabal, Natacha Krief, sort en salles le 27 novembre 2024
Le film est projeté ce mardi 12 novembre en avant première au Comoedia de Lyon en présence de sa réalisatrice Mareike Engelhardt.