A Michel B, juste ces quelques mots d'amour...
On a l'habitude de dire que, lorsqu'une personnalité publique que l'on aimait particulièrement décède, on se souvient exactement du moment de l'annonce de sa mort. Il se trouve que me concernant, l'adage se vérifie souvent : si je ne me souviens plus du tout du moment (pourtant récent) de l'annonce de la mort de Gérard Rinaldi, celle de la disparition de Michel Berger, il y a 20 ans jour pour jour, est encore tout frais dans mes esprits.
J'étais en effet en vacances dans le sud avec mes parents lorsqu'on a mis le journal de 20 heures et qu'on a appris cette mort totalement soudaine et inattendue, et toute la famille a reçu cette nouvelle comme un vrai uppercut.
Le couple qu'il formait à l'époque avec France Gall semblait si solide, l'album Laissez passer les rêves caracolait en tête de tous les hits parades qu'on le sentait totalement incivible. Du coup, entre les Paris match sur ce bonheur foudroyé, et les écoutes en boucle de ses albums, j'ai passé le mois d'aout 1992 avec Michel Berger, d'une manière totalement exclusive, comme on peut l'être à 16 balais...
Et je me suis alors apercu que j'étais loin d'être le seul à avoir reçu l'annonce de ce déces comme un vrai choc, tant les chansons de Berger ont accompagné plusieurs générations de mélomanes, du plus, au moins exigeant d'entre eux. Berger, comme Sanson, témoigne d'un tel talent de compositeur en puisant son inspiration de plusieurs groupes anglo saxons de taille que tout le monde est obligé de reconnaitre que son génie créatif, même les moins passionnés au départ par la variété française dont il fut un vrai chef de file et un vrai précurseur en la matière.
À contre-courant des modes, Michel Berger a eu par exemple la grande intelligence de "dépoussiérer" l'univers de la comédie musicale avec Starmania, qui, recèle quelques vraies pépites totalement indémodables: Le monde est stone, Le Blues du businessman, Ziggy. Fidèle à ses habitudes, il s'est consacré avec passion à ce travail réalisé avec le parolier Luc Plamondon.
Personnellement, Berger m'a accompagné, pratiquement de mes 8-10 ans jusqu'à aujourd'hui.
Par exemple, dans les différents courts de chant auquel j'ai pu participer, j'ai toujours interprété avec le plus grand plaisir un bon nombre de ses morceaux, de Mademoiselle Chang à Celui qui chante. Car, même dans ses morceaux les plus rythmés, les plus dansants, je trouvais cette pointe de mélancolie qui laisse terriblement survenir l'émotion.
En fait, ce qui me plaisait particulièrement chez Berger, c'était sa propension à associer son art comme partie intégrante de sa vie privée.
L'exemple de Véronique Sanson fut édifiant : alors qu'ils partagaient une complicité de tous les instants, la jeune femme le quitte pour le chanteur américain Stephen Stills. «J'ai quitté Michel en lui disant que j'allais acheter des cigarettes, C'était comme si je lui avais planté un poignard dans le cœur.» Effondré, Michel Berger écrira plusieurs chansons magnifiques sur sa rupture, et notamment Seras-tu là?, destinée à son nouvel amour France Gall, échaudé qu'il était par le départ impromptu de son ancienne compagne..
Et c'est avec ce merveilleux morceau, beau à en faire couler les larmes, que je voulais clore cet hommage à cet immense artiste.