La belle vie : un beau film!!
Pour mon avant première du dimanche soir, j'aimerais, en ce premier dimanche d'avril, vous parler de La Belle vie, non pas la chanson très connue de Sacha Distel (oh, la belle vie...la la la, mais si, vous connaissez tous cela par coeur :o)), mais le premier long métrage de Jean Denizot, qui sort mercredi prochain dans les salles et un film dont j'avais pas mal entendu parler avant même de le voir en avant première la semaine dernière.
En effet, ce film a remporté le Prix Label Europa lors de la dernière Mostra de Venise, et surtout pour moi qui ai un lien particulier avec ce festival, a été récompensé du prix spécial du jury et le prix du public du festival d’Annonay cette année.
Attiré par ces récompenses, j'ai essayé de voir le film- grâce à Cinésud- sans rien savoir du tout de l'histoire, et très vite, cette intrigue- un père qui vit en clandestinité et de façon bohéme avec ses deux fils qu'il a enlevé à leur mère voilà dix ans et dont la cavale touche à la fin- m'a semblé bien vite très familière, ce que m'a confirmé le dossier de presse que j'ai reçu avec le film.
En effet, comme je lis très souvent les faits divers dans la presse, le cinéaste a pris comme point de départ cette fameuse affaire Fortin dont on avait parlé beaucoup en 2009, du nom de ce père, Xavier Fortin, qui avait pris la fuite avec ses deux enfants, qu’il ne rendra à son ex-femme que onze ans plus tard, en 2009, lors de son arrestation et qui avait été condamné à deux mois de prison ferme par le tribunal correctionnel de Draguignan.
Je me suis alors dit qu'on aurait droit à une reconstitution détaillée de cette affaire judiciaire qui avait bien fait parler d'elle, et j'ai eu alors quelques craintes, vu que ce genre qui n'a pas toujours donné lieu à de grands films (dans les plus récents exemples citons Rapt de Lucas Belvaux ou Possession d'Eric Guirado), mais Jean Denizot a préféré s'éloigner de la réalité des faits pour inventer une autre suite à cette histoire, en fictionnalisant une ultime fuite désespérée de père (rebatptisé Yves) avec le seul de ses deux fils qui a choisi de rester avec lui.
Et cette fuite, qui a pour cadre une superbe île sauvage de la Loire, est l'occasion pour le cinéaste de mettre en avant la beauté des grands espaces. Et loin du naturalisme cher au cinéma français, Denizot opte plus pour un format en scope valorisant énormement ces grands espaces, très proche d'un regard que pose un certain cinéma américain, de Terence Malick à Jeff Nicchols (on pense beaucoup au récent et magnifique "Mud"), en passant par, dans les références les plus anciennes, au mythique Raul Walsh.
Denizot a parfaitement réussi à capturer la beauté et la lumière unique (très beau travail du chef opérateur d' Elin Kirschfink) de ces paysages vus rarement dans le cinéma français, et aidé par la très belle bande sonore de Rosemary Standley du groupe franco-américain Moriarty et les poèmes de l'américaine Emily Dickinson, font de cette Belle vie une expérience visuelle vraiment singulière et réussie.Mais outre une ode aux grands espaces, "La belle vie" est également un joli récit iniatique qui voit un jeune garçon de 17 ans essayer tant bien que mal de passer à l'âge adulte, mais avec encore plus de difficulté qu'un jeune "normal".
En effet, Sylvain a pour grande difficulté d'essayer de s'affranchir des griffes d'un père avec qui il a vécu pendant 12 ans en totale fusion, mais qui n'est pas moins totalement castrateur. Et c'est par le biais d'une très jolie jeune fille (jouée par l'excellente Solène Rigot vue récemment dans "Tonnerre" et "Lulu femme nue libre") et qui connait également des problèmes avec son père, que Sylvain prendra conscience qu'une vie en dehors de ce père à la fois géolier et aimant est possible.
Et cette prise de conscience est d'autant plus juste que le jeune Zacharie Chasseriaud (vu dans les Géants de Bouli Lanners) donne à Sylvain toute la densité et la sensibilité nécessaires à ce rôle. Et dans le rôle si complexe de son paternel, Nicolas Bouchaud, un acteur de théâtre très peu vu au cinéma, apporte une étrangeté et un magnétisme assez incroyable .
Bref, "La belle vie, aussi bien convainquant récit d'apprentissage à la vie adulte et éloge très convaincante de la nature, "La belle vie" est un des très beaux films français de ce début d'année, et que je vous recommande sans l'ombre d'une hésitation, si bien sûr il passe près de votre ville.
LA BELLE VIE Bande Annonce (2014)