La lutte des classes : vive la comédie française intelligente et drôle !
Pour son cinquième long-métrage Michel Leclerc , le réalisateur du absolument génialissime " Le Nom des Gens." réunit Leïla Bekhti et Edouard Baer dans "La Lutte des classes "à l'affiche des salles de cinéma depuis mercredi dernier
Quatre ans après un décevant La Vie très Privée de Monsieur Sim, le réalisateur revient très en forme avec cette comédie grinçante qui, comme son titre l’indique, dénonce un système actuel qui pousse à accroître cette fameuse lutte des classes. Michel a vu le film et vous en dit pas mal de bien dès maintenant :
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Mais qu’ils sont beaux, drôles et pleins de certitudes Paul et Sofia. Elle, sans renier ses origines banlieue Est, est devenue une jeune et brillante avocate dans un grand cabinet parisien.
Lui quadra, musicos sans emploi, est sympathique et un peu pathétique dans ses vieux restes Punk and Rock Roll attitude.
Mais on s’aime et on s’engueule tendrement dans cette famille recomposée tout droit sorti d’un dossier de l’Obs sur la “ bobo/gentrification” de la proche banlieue parisienne.
Paul et Sofia sont surtout plein d’attention pour Corentin leur fils scolarisé dans l’établissement tout près. Mais justement être le seul petit « blanc » dans la classe n’est-ce pas trop dur pour notre fils adoré ? Surtout que tous les enfants des pavillons voisins sont chez les « curés » le collège privé qui a si bonne réputation.
Mais chez Paul et Sofia on ne mange pas de cette ostie-là et on est pas près de renier ses engagements idéologiques, la preuve on s’aime très fort et on est même pas marié.
Un voisin juif traditionaliste ( l'excellent Laurent Capuelo), un couple de parent d’élève musulman pratiquant, un directeur d’école compréhensif mais aux méthodes bien personnelles ( l'impayable Ramzy Bédia) et une institutrice trop appliquée ( Baya Kasmi, l'épouse du cinéaste et coscénariste du film) se débattant comme ils peuvent, les certitudes de Paul et Sofia se craquèlent, se fissurent comme les murs de Jean-Jo (Jean-Jaurès) l’école publique du secteur.
Vraie photographie d’une ville de banlieue, ni mieux, ni pire que la moyenne dans la France de ce début de siècle, « La lutte des classes » a l'immense mérite de poser de vraie bonnes questions et a également la belle intelligence de ne pas apporter des réponses faciles ou manichéennes et d'éviter l'angélisme primaire.
D'excellents acteurs (le duo Edouard Baer et Leila Bekthi forment un couple adorable auquel on croit vraiment, et le film tire beaucoup de leur puissance de jeu) des situations drôles et bien senties, une ironie jamais cynique ( Michel Leclerc n'est pas un cinéaste du cynisme et du jeu de massacre) et une bienveillance permanente envers des personnages parfois butés dans leurs conviction, et qui évitent largement la caricature sont les premiers atouts de cette comédie pleinement réussie, dont seule la mise en scène ( malgré quelques jolies trouvailles) n'est sans doute pas aussi inventive que dans le nom des gens, qui reste le chef d'oeuvre de Leclerc.
Mais on ne boudera assurément pas notre plaisir car dans la production actuelle de comédies française, le nouveau film de Michel Leclerc reste un divertissement de très grande qualité, alliage fort réussi de satire sociale et de chronique familiale plus douce qu'amère.
Et sans trop en dévoiler les contours, reconnaissons que la scène finale qui nous montre notre école républicaine et laïque bien mal en point est une image très forte ...et on n'oublie pas la formidable scène autour de la non moins formidable chanson de Jeanne Cherhal " merci", et on dira donc merci à Michel Leclerc pour ce qui est sans aucun doute une des meilleures comédies de ce début d'année.
Bande-annonce du film La Lutte des Classes