Le vent reprend ses tours : un conte émouvant et lumineux
" En disant cela, Gavril avait esquissé quelques pirouettes avec la grace d'un balai brosse, manié par un pochard"
Nathan découvre un beau jour sur un avis de recherche le visage d'un homme qu'il croyait mort depuis vingt cinq ans, un saltimbanque roumain qu'il a croisé lors de son adolescence et qui avait totalement enjolivé sa triste vie de l'époque, lui, adolescent timoré.
Nathan décide alors de partir à la rencontre de cet ami perdu de vue, essayant de savoir pourquoi on lui a caché qu'il était toujours vivant et cette amitié vive entre un jeune enfant et un immigré tzigane est le sel de cette épopée sur les traces de son passé.
Le charme de Sylvie Germain dont on a souvent parlé sur baz'art continue de fonctionner à plein régime avec ce nouveau roman : la narration alterne les allers retours entre passé et présent et nous dit pas mal de choses passionnantes sur les lâchetés des hommages, la persécution des tziganes pendant la 2e guerre mondiale, les courages insoupçonnés qu'on a au fond de soi et sa faculté de réconciliation intérieure.
"Obtempérer à l'air du temps ne pas se faire remarquer plus que nécessaire. Toute cette inconsistance lui saute aux yeux, le prend à la gorge."
Grâce à la plume lumineuse et délicate de Sylvie Germain, ce conte s'avère avant tout comme une formidable ode aux poètes et aux traces que les grands hommes laissent derrière soi, ainsi qu'à la beauté des cultures ancestrales .
Œuvre singulière, fable philosophique et poétique, ce "vent reprend ses tours" nous emporte très loin en littérature pour peu que l’on accepte le voyage.
• Le Vent reprend ses tours, de Sylvie Germain, Albin Michel, 212 p., 19 €.