Rencontre musique : Interview d'Olivier Volovitch, un des membres du groupe Volo!
Il y a une dizaine de jours, on avait dit énormément de bien du nouvel album des frangins Volo intitulé "Avec son frère". Une nouvelle fois, le récit de l’intime dont les frères Volovitch se sont fait une spécialité, tutoyait les tourments de l’époque et avec des réflexions très générationnelles et en même temps singulière qui prend à rebours les clichés.
En 2017, on n'avait pas réussi à vous mettre l'interview du groupe qu'on avait réalisé lorsqu'ils étaient venus dans le cadre de leur tournée présenter leur nouvel album Chanson Française.On s'est rattrapés cette année, en prenant notre téléphone le 25 mars dernier pour échanger avec un des deux membres du groupe, Olivier (celui qui porte les lunettes et la barbe, si jamais vous confondez les deux) et voir comment ils vivaient la sortie de l'album, dans ce contexte si particulier de la crise du Covid 19 :
Interview d'Olivier Volovitch, membre du groupe Volo
pour l'album "Avec son frère "
Baz'art : Ma première question est forcément liée au contexte actuel. Comment vit-on, en tant que membre du groupe Volo, cette période de confinement, d'autant plus quand on vient de sortir un album le 13 mars, soit le jour même de la décision de tout fermer et qu'on ne peut absolument pas le défendre sur scène comme vous aviez prévu de le faire et notamment sur Lyon pour le festival "Chant de Mars", le 26 mars?
Olivier : Cette période est évidemment particulière, mais sincèrement, je la trouve plus inquiétante pour les autres et pour le monde en général que pour nous ,Volo et pour notre album qu'on ne peut pas défendre comme on aimerait le faire en temps normal.
Alors évidemment, la sortie du disque tombe vraiment pas bien, à croire qu'on l'a fait expres (rires).
Evidemment aussi que, comme tous nos collègues musiciens et intermittents, on se voit retirer temporairement notre source principale de revenus à travers les concerts mais franchement, la période n'est pas propice à l'appitoiement sur son petit malheur .
Après, je suis les actualités assez assidument : cette épidémie, on la sentait venir quand même, donc je ne peux pas dire que j'étais totalement surpris par ce qu'on vit actuellement.
Là, on observe ce monde d'aujourd'hui qui semble totalement s' écrouler et forcément ca nous parle en tant que citoyen concerné.
A un niveau plus personnel, pour répondre à ta question, on fait la promotion du disque par des voies détournées, on a sorti notre premier clip ce jeudi et on essaie de reporter les dates que l'on peut à l'automne (ca sera notamment le cas pour la date lyonnaise dont tu parles), les autres artistes ont évidemment la même préoccupation que nous.
Le spectacle vivant est comme, d’autres domaines d’actvité, totalement à l’arrêt et les conséquences économiques pour beaucoup de ses acteurs sont assez catastrophiques, je ne peux le cacher....
Baz'art : Ce qui est étonnant lorsqu'on écoute votre disque en période de confinement, c'est qu'on a l'impression que vous avez des talents prophétiques. Il y a sur cet album, si on le compare aux précédents et notamment au dernier "Chanson française", moins de chansons engagées, moins tournées vers l'extérieur au détriment de chansons sur la cellule familiale, vos enfants, votre couple...Vous aviez anticipé ce retour à ces valeurs là?
Olivier : Oh non, nous ne sommes pas des visionnaires , désolé de te décevoir à ce sujet ( rires).
Je risque de te donner une réponse un peu différente que Frédéric sur ce sujet , car il a quand même écrit sur ce disque des textes comme " Je me demande quand " ou " mon bout de trottoir" qui sont bien tournés sur l'extérieur, comme tu dis.
Personnellement, c'est vrai que sur cet album, j'avais vraiment envie de rester dans l'intime et dans les relations familiales et mettre un peu de côté les morceaux qui osent la critique politico-sociale ou qui interrogent l’état- mal en point je te l'accorde- de ce monde.
J'ai écrit des chansons dites "concernées" sur les autres albums- pas plus tard d'ailleurs que sur l'album précédent avec un "Gars honnete"- et j'en récrirais sans doute mais là, j'avais ni l'inspiration ni l'envie d'écrire sur ces thématiques là.
C'est sans doute un peu égoiste et pas très glorieux comme démarche, et comme je viens de le dire, je pense être, comme mon frère, un citoyen concerné et très alerte sur les enjeux internationaux et les problématiques de justice sociale, mais je t'avouerai que comme tout cela m'angoisse un peu, j'ai préféré rester sur des problématiques plus en phase avec mon bonheur lié à ma petite bulle familiale .
Mais pour l'anecdote, sache que ce besoin de ne parler pratiquement que de l'intime a inquiété nos proches et notamment notre maman, qui en l'écoutant la première fois, nous a demandé si on allait bien dans nos vies ( rires) car cela ne se voyait pas forcément..
Alors qu'au contraire, au niveau personnel , ça va vraiment bien , c'est plus au niveau collectif qu'on peut s'inquiéter lourdement ..
Baz'art : Au niveau de votre façon de travailler, vous utilisez toujours le même processus, n'est ce pas?: Chacun écrit son texte dans son coin sans que le frangin ne soit au courant et vous le montrez à l'autre une fois que la chanson est finalisée?
Olivier : Tout à fait, depuis 15 ans qu'on chante ensemble, la règle est immuable : on écrit chacun nos chansons de notre côté, texte et musique - on a souvent besoin d'avoir une mélodie pour commencer à écrire quelques jets- et il faut que le résultat final plaise à l'autre si on veut que la chanson reste dans l'album.
La plupart des chansons sont écrites par l'un ou par l'autre dans son intégralité. En général, l'autre n'est pas au courant ni du morceau ni du thème choisi avant qu'on lui propose, mais il peut arriver qu'il se pointe alors que l'autre est en train de travailler sur un truc et qu'il dise " tu bosses sur quoi, là, tu me montres"? ce qu'on va forcément faire, même si ce n'est pas totalement fini .
Evidemment, il arrive souvent qu'on propose une chanson à l'autre qui n'est pas totalement aboutie. Si c'est moi qui l'a écrite et composée, Frédo va m’aider avec ses conseils pour que j’en fasse une chanson plus satisfaisante pour le collectif Volo et la plupart du temps on prend en compte les conseils de l'autre mais pas toujours (rires) .
On a réalisé très peu de chansons à quatre mains en fait; en général il y en a une par album seulement. Pour cet album, c'est celle qui ouvre le disque et qui porte le titre de l'album "Avec son frère", où l'on s'est nourri mutuellement de nos échanges sur telle ou telle partie du texte et Frédéric s'est ensuite occupé de la partie mélodie avec notre réalisateur Alexis Campet.
Baz'art : Parlons justement de l'écriture qui semble vraiment une étape importante pour vous. Vous semblez avoir, chacun de votre côté une sensibilité bien différente, j'ai l'impression que ta plume est plus littéraire, plus poétique que celle de Frédéric, qui lui s'inscrit plus dans le concret, dans le pragmatique, si je peux schématiser ainsi ?
Olivier : C'est certain qu'on accorde énormément d'importance aux textes.
On n' a rien contre la simplicité, tu sais, et l'auditeur ne s'en rend sans doute pas toujours compte, mais c'est très difficile d'atteindre l'épure et la simplicité .
Après, évidemment il y a des différences entre nos deux façon d'écrire, comme à la base il y a des différences dans nos deux univers à tel point qu'au début de laventure, on avait quand même des gros doutes sur la façon dont nos deux univers allaient bien pour pouvoir se marier..On n'a ni la même façon de jouer de la guitare ni les mêmes styles d’écriture.
Bien sûr, je ne peux que me flatter d'entendre que tu accolles l'adjectif de "poétique" à mes textes, car en toute modestie c'est quelque chose que j'aimerais atteindre, j'aime beaucoup ce genre d'écriture, un peu métaphorique, ésotérique on peut dire.
Contrairement à Frédéric, j'ai besoin de partir de quelque chose de tangible, je n'arrive pas trop à partir d'une feuille de blanche, c'est pour cela que dans cet album, j'ai repris un poème de Verlaine (Chanson d'automne) ou bien encore les correspondances de Sand et Musset , car ces classiques de la littérature me donnaient une base solide de départ à mes véilleités d'écriture.
Et en même temps, je suis très admiratif de la façon dont Frédéric écrit; il possède ce talent de partir de choses très concrètes, très quotidiennes et rédiger des textes à la fois simples et singuliers , je pense que chacun envie un peu la plume de l'autre c'est aussi cela qui fait qu'on continue à bosser ensemble et rester en d'excellents termes, il me semble (rires).
Baz'art : Tu parles de la chanson "En vérité " que tu as écrite à partir de la correspondance amoureuse entre George Sand et Alfred de Musset. C'est parce que ces écrits- comme d'ailleurs le poème Verlaine chanson d'automne que tu as aussi revisité- font partie du domaine public que tu as eu cette idée?
Olivier : Oh non, je me pose pas cette question au départ, encore heureux! Si je voulais faire des emprunts uniquement aux classiques parce cela fait partie du domaine public, ca serait triste et un peu réducteur quand même (rires). "Envérité" est effectivement une chanson qui a été inspirée par la lecture de la correspondance amoureuse entre George Sand et Alfred de Musset que j'ai lu il y a quelques années et que j'ai trouvé d'une grande puissance littéraire et émotionnelle.
On voit que leur échange a pour vocation a être lu par d'autres, qu'ils ont ce talent d'écriture dans le sang..
Le texte mélange leurs mots mais parle à la première personne en adoptant le point de vue de celui qui aime encore. J'ai aussi voului le construire autour de cette idée selon laquelle l'absence physique va immanquablement de paire avec le souvenir prégnant et constant de celui ou celle qui nous manque.
Cela m’a beaucoup amusé de mélanger leurs mots et le résultat nous a plu, à Frédéric et à moi, ainsi qu'à tous les professionnels et aux proches à qui on l'a fait écouter .
Et on l'aime tellement ce morceau, que c'est le premier clip de cet album, on a choisi de le mettre en scène avec une très talentueuse danseuse entre nous deux, pour bien exprimer ce manque physique entre les deux amants.
On a envie de progresser sur les clips qu'on propose aux internautes, car on a pleinement conscience du rôle que l’image joue aujourd’huidans la musique et la façon dont la musique peut être accueillie et diffusée.
Nous n'avons jamais été les plus doués en terme d'’image mais essaie de s' améliorer dans ce domaine en s'entourant de gens qui le sont, eux ( rires)!
Baz'art : Au niveau de vos textes, il y a bien sûr une continuité par rapport à vos précédents albums, celui du temps qui passe inexorablement et dont l'impact se fait ressortir à l'échelle intime et une façon différente dappréhender certaines thématiques. Je pense par exemple à la chanson "Depuis quand "qui aborde le sujet de l'adultère, comme le faisait "C'est pas tout ça", mais ce coup ci c'est la femme qui trompe l'homme et ce dernier n'en fait pas un drame. Vous y pensez beaucoup à ces sortes de miroirs inversés entre les titres de vos différents albums?
Olivier : Non, on n'intellectualise pas trop cela, en fait. Disons qu'on a rapidement compris, notamment parce que le public nous l'a vite renvoyé, qu'on faisait des chansons dites générationnelles qui touchait justement les gens de notre génération avant tout.
Le monde avance de la même manière pour tout le monde au fil des années, à tel point qu'il s'avère impossible de se réinventer totalement à chaque album.
Et en même temps, on avance dans nos vies, comme ceux qui nous écoutent depuis le début, avec nos enfants, nos amours, nos joies, nos peines, nos potes, nos parents qui viellissent, les maisons d'enfance qu'il faut vendre, ect..Bref, on grandit avec nos chansons et ce qu’on racontait quand on a commencé à 25 ans est forcément différent de ce qu’on raconte maintenant, l'angle est forcément différent en fonction de notre ressenti, notre expérience, notre compréhension du monde.
Ce qu'on essaie vraiment de faire en tout cas ,c'est de ne de pas faire deux fois la même chanson, notamment dans le domaine de la chanson d'amour, un thème tellement éculé qu'il est facile de faire un truc qu'on a entendu déjà 100 000 fois ailleurs.
Effectivement, "Depuis quand" est une façon assez singulière, et selon moi assez peu vue ailleurs, de parler de l'infidélité sans regard moralisateur et cupabilisant , une portée qui est tellement présente quand on parle de ce sujet.
J'ai discuté avec mes proches, notamment avec mes parents, de ce sujet et cela a nourri une réflexion que j'ai voulu à contre courant sur cette question de la fidélité.
J'ai imaginé que si ma femme me trompait, cela serait pas mal si je n'en faisais pas toute une histoire et que je prenais le truc avec philosophie en me disant que ca pourrait décupler l'ardeur dans notre couple.
C'est une vision assez utopiste, je te l'accorde, et si tu veux tout savoir, si cela m'arrivait vraiment, je ne pense pas du tout que je réagirais ainsi, mais je trouvais bien de faire preuve de plus de grandeur d'âme en tant qu'artiste et de le chanter (rires) ...
Baz'art : La grande nouveauté, si je peux dire, de cet album, c'est l'absence sur certains titres de votre fameuse guitare nylon. C'est une vraie révolution, ça, pour les fans des Volo, vous vous en rendez compte?
Olivier : Révolution, le mot n'est-il pas un peu fort (rires)? Mais en effet, c'est quelque chose de vraiment inédit chez nous.
L'idée ne vient pas de nous mais de notre arrangeur Alexis Campet, qui a réalisé et produit tout l'album, et ce fut une rencontre vraiment enrichissante à tous les niveaux .
On a toujours été conquis par ses propositions et parmi elles, cette volonté qu'il avait que la guitare disparaisse pendant certains titres. On ne l'avait jamais fait,certains éditeurs nous l'avaient proposé sur certains albums précédents mais on était pas convaincus et là ca nous a vite botté.
C'est vrai que le style Volo, si on peut parler d'un style Volo, c'est au départ la guitare voix et des textes forts, et là même si la majorité des titres privilégient encore la guitare, on a eu envie de sortir de notre zone de confort, en studio et aussi sur scène.
On a joué déjà les morceaux de l'album en concert plusieurs fois et sur certains des titres comme "Contre Lune", ni Frédéric ni moi ne nous accompagnons d'une guitare, c'est un vrai défi, je te l'accorde ( rires).
Baz'art : Vous situez comment votre place dans la scène musicale française actuelle: en êtes vous globalement satisfait ou auriez-vous aimé avoir encore plus de succès et de reconnaissance du grand public, eu égard à votre talent?
Olivier : Cela surprend toujours un peu quand on dit cela, mais vraiment on n'a pas du tout à se plaindre de notre situation même si on entend parfois cela, que le grand public ne nous connait pas. Mais déjà, c'est quoi exactement, cet animal bizarre qu'est le grand public? ( rires).
Sincèrement, on a l'immense chance de pouvoir vivre de notre musique, et sans faire preuve de fausse modestie, on a conscience de ce qu'on représente dans l'industrie musicale, à savoir pas grand chose ( sourires).
On sait qu'on n'est pas des gros vendeurs de disques et qu'on le sera sans doute jamais, on passe moins à la radio qu'à une époque où il y avait plus de demandes pour notre style musical, on le déplore mais il n'y a pas non plus de quoi en faire un drame, tant qu'on peut jouer nos titres en live et le faire partager à notre fidèle fidèle c'est vraiment cela le plus importants .
Du coup le disque qui sort en pleine pandémie mondiale, ca change pas énormément de choses à ce niveau là...
On a essayé de jouer dans des très grandes salles, et d'aller dans certaines directions pour faire venir le plus de gens possible à nous, mais on s'est aperçus qu'on était pas toujours très à l'aise avec les concessions que cela entrainait, même si on a fait rien de véritablement honteux à nos yeux.
On fait des chansons très intimistes, qui s'adressent à un certain nombre de personnes mais pas à une masse énorme, et franchement on le vit très bien.
On n'a jamais eu le fantasme d'avoir un disque d'or et de passer à la TV, au contraire même à chaque fois qu'on est passé sur le petit écran on n'a compris que c'était pas du tout notre truc.
Ce qui est en revanche certain, c'est qu'on a besoin du soutien du public et de gens comme vous à Baz'art qui nous soutiennent depuis le début et qui communiquent sur la sortie du disque..
Car on s'aperçoit parfois que même des gens de notre entourage proche ne sont pas au courant qu'on a sorti un disque alors qu'on pensait qu'en terme de communication, on avait fait tout notre possible (rires).
Et cette année, avec le Coronavirus, je ne suis pas sûr que l'information principale soit le fait que Volo ait sorti un nouveau disque..
Baz'art : Ah cher Olivier, croyez le, on va tout faire pour clamer haut et fort que vous venez de sortir un disque et que celui ci est formidable et qu'il faut l'acquérir- de façon dématérialisée tant qu'on peut pas sortir de chez nous- au plus vite ...
A noter que pendant toute la durée du confinement Olivier fait régulièrement des concerts en direct sur la page facebook du groupe et cest vachement chouette et ca se passe ici
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