Du côté des indiens : Isabelle Carré confirme tout son talent littéraire!
"Il s’est trompé, il a appuyé sur la mauvaise touche, pensa aussitôt Ziad. Il ne va pas tarder à redescendre… Une fois de plus, il se retint de crier : « Papa, tu fais quoi ? Papa ! Je suis là, je t’attends… » Les minutes s’écoulaient lentement, comme au Scrabble quand les mots comptent double. Pourquoi son père tardait-il à réapparaître ? Les courroies élastiques de l’appareil s’étirèrent encore un peu, imitant de gigantesques chewing-gums. Puis une porte s’ouvrit là-haut, avec des rires étranges, chargés d’excitation, qu’on étouffait. Il va réaliser son erreur, se répéta Ziad, osant seulement grimper quelques marches, sans parvenir à capter d’autre son que celui des gosses qui jouaient encore dans la cour malgré l’heure tardive, et la voix exaspérée de la gardienne qui gueulait sur son chat. Mais son père s’était volatilisé dans les derniers étages de l’immeuble, et ne semblait pas pressé d’en revenir."
Avec "Les rêveurs" , la très discrète comédienne française Isabelle Carré faisait une entrée remarquée en littérature en nous plongeant dans son enfance un peu décalée, entre une mère lasse et border line et un père désigner qui avouera son homosexualité tardivement dans un geste libérateur.
Après un premier roman consacré à son enfance entre deux parents fantasques, Isabelle Carré quitte l'autobiographie et gagne définitivement ses galons de romancière avec du "Côté des Indiens", un livre qui est beaucoup plus romancé, même s'il comporte évidemment quelques éléments autobiographiques.
Partant d'une histoire entendu à la radio- un petit garçon qui attend son père dans son immeule voir celui ci aller plus haut dans l'ascenseur pour aller rejoindre sa maitresse, la voisine du dessus - Isabelle Carré nous prend par la main et nous guide sur le fil de sa vie.; un fil tout en délicatesse tissé de souvenirs de sa famille pas comme les autres.
On aime profondément cette belle délicatesse des personnages et lorsqu'on creuse un peu en dessous des couches de vernis, se dissmulent névrose et noirceur qui anime chacun des personnages.
Cette quadruple histoire comporte son lot de tempetes et de vagues mais aussi d'espoir et de résilience sans pour autant tomber dans le mièvre ou le feel good book ( un écueil que le dernier roman de Cécile Pivot, au thème assez proche, n'évitait pas toujours).
Dans ce beau et sensible "du Coté des Indiens", Isabelle Carré réussit parfaitement comme dans un long métrage à alterner les prises de vues pour nous livrer un quator de personnage étonnant et loin des stétérotypes.
Isabelle Carré "Du côté des indiens" (Grasset) ; août 2020
Avec "du côté des indiens", la comédienne Isabelle Carré confirme tout son talent littéraire entrevu avec son premier roman.. Des personnages très attachants, unis par l'amour du cinéma forment un quatuor étonnant qu'on a eu du mal à lâcher #MardiConseil pic.twitter.com/t6rvVCMJmR
— Baz'art (@blog_bazart) September 22, 2020