On craque pour les polars d'Abir Mukherjee ou l'histoire anglo-indienne racontée avec jubilation!
On avait découvert le romancier indo-anglais (enfin écossais plus exactement si l'on veut être précis ) Abir Mukherjee avec son premier roman L'Attaque du Calcutta-Darjeeling, qui nous plongeait dans une enquête mélé d'une bonne pincée d'un humour bie british dans le Calcutta de 1919 .
L'Attaque du Calcutta-Darjeeling était en fait le premier tome d'une quadrilogie déjà écrite avec d'un duo d'enquêteurs étonnants, Wyndham et Banerjee.
Ce roman jubilatoire vient de sortir en poche chez Folio,simultanément à la sortie en grand format chez Liana Levi du second volet de sa saga intitulé " Les Princes de Sambalpur".
Ce qu'on aime particulièrement chez Abir Mukherjee, c'est qu'il possède l’intelligence de ne pas trop se prendre au sérieux, il est aussi très fort pour replacer ses héros dans un contexte géopolitique passionnant, l’empire britannique avant son départ d’Inde...
« La douleur familière a commencé. Pour le moment elle se limite aux biceps, mais elle ne va pas tarder à s’étendre – d’abord aux muscles du dos, puis à la poitrine et aux cuisses, et finalement dans les os. Avec elle viendra le brouillard ; il descendra d’abord comme une brume légère sur mes synapses, puis il gonflera, se congèlera, se solidifiera, il se serrera comme un poing dans mon crâne pour en chasser finalement toute pensée sauf une : l’opium. »
Le fils aîné du maharajah de Sambalpur est assassiné dans les rues de Calcutta. Il venait de demander de l’aide au capitaine Wyndham car il savait sa vie en danger.
Son frère puiné, le prince Punit, en devenant le prochain prétendant au trône semble le coupable idéal, mais nous sommes en Orissa une région de la côte Est de l’Inde dont les sous-sols, riches en diamant et en charbon, excitent bien des convoitises.
Sam Wyndham réussira-t-il à déjouer la machiavélique machination qui met en péril le petit royaume de Sambalpur ?
« Les eunuques sont en quelque sorte des conseillers pour les dames du zenana. Et ils sont fiers de garder les secrets qu’elles leur confient. Beaucoup d’eunuques sont devenus riches et puissants à l’égal des femmes qu’ils servent. Et cela sans qu’y soient mêlés ni le cœur ni la chair. »
Parviendra-t-il à lutter contre son addiction de plus en plus envahissante à l’opium ?
Mais surtout gagnera-t-il le cœur d’Annie Grant, la belle métisse dont il est tombé amoureux, qui ne semble pas insensible pas aux charmes de son altesse le futur roi.
Vaillamment secondé par le lieutenant Sat Banerjee, un jeune indien diplômé de Cambridge, Wyndham va devoir s’initié aux arcanes de pouvoirs royaux millénaires et à une religion dont il ignore tous les rites.
"C’est en effet la conjonction des deux qui à l’origine l’a amené à Calcutta. Et après une ou deux tournées il raconte volontiers l’histoire de sa vie: comment, dans sa jeunesse, à Glasgow, son ambition était de gagner ses bières à coups de poing d’un bout à l’autre du comptoir au pub Bon Accord, ce qu’il n’a jamais vraiment réussi sans finir à l’hôpital. Là il a trouvé Dieu, et Dieu, dans ce que je pense avoir été une plaisanterie, lui a demandé de partir comme missionnaire à Calcutta, tâche à laquelle il était inapte par nature, son goût pour la bagarre étant en contradiction avec l’éthique missionnaire, et finalement il s’est séparé de ses frères et a fini comme dessinateur de la police du Bengale."
Derrière une sympathique comédie policière et romantique, Abir Murkherjee nous permet de réviser notre géographie-politique du siècle dernier. En 1920, l’empire britannique est encore le plus grand pays du monde, mais pour combien de temps ?
Dans l’Inde à la culture religieuse très présente, le climat délétère du pouvoir coloniale est formidablement reconstitué.
Chaleur et poussière, corruption et trahison, « Les princes de Sambalpur » est un récit exotique très agréablement instructif et so british, entre Agatha Christie, E.M Forster, saupoudré de Conan Doyle.
2/ L'Attaque du Calcutta-Darjeeling ( Folio; 15 octobre).
"Dites moi honnêtement, capitaine. En dehors des missionnaires, combien avez-vous rencontré de vos concitoyens réellement heureux? Ils maudissent les indigènes et le climat, passent leurs journées imbibés de Gin dans le splendide isolement de leurs clubs, et pourquoi? Pour pouvoir vivre avec la prétention d' être ici pour le bien des indigènes. Tout cela est un mensonge, capitaine. Et c' est à nous-même plus qu' aux Indiens que nous mentons. Ceux d' entre eux qui sont éduqués, poursuit-il en indiquant Banerjee, nous voient tels que nous sommes, et quand ils demandent l' autonomie nous prétendons ne pas comprendre comment ils peuvent être aussi ingrats."
Calcutta 1919. Après trois années passées dans les tranchées et veuf depuis peu, le capitaine de police Sam Wyndham est muté aux Indes dans les colonies de sa Royal Majesté.