SLALOM : un premier long métrage qui truste le haut du podium
Slalom, le premier long métrage de Charlène Favier, devait sortir en salles mercredi dernier, le 4 novembre.
Forcément, en raison de la crise sanitaire et du nouveau confinement cela sera pour plus tard, peut etre en décembre peut être au dela, début d'année prochaine.
Mais pour avoir vu le film en projection presse la semaine passée juste avant le confinement il était important d'en parler dès maintenant et vous mettre l'eau à la bouche histoire de vous faire courir dans les salles dès qu'il sortira :
Comme Charlène Favier nous l'a elle même confié sans hésiter mais sans pour autant rentrer dans le détail lors de notre long échange avec elle, Slalom est un film qui s’inspire tragiquement d’une expérience personnelle forcément douloureuse .
En effet, la jeune cinéaste fut elle-même victime de violences sexuelles, lorsqu'elle était plus jeune, dans le milieu du sport, mais pas celui du ski où est situé son récit .
Si elle a mis plusieurs années à digérer ce tissu autobiographique et en écrire une fiction qu'elle a commencé à écrire sur .sur les bancs de la FEMIS, le désir d’extérioriser, à travers l’art, ce bouleversement tragique donne à son premier long une sincérité et une nécessité formidable au projet, un peu comme l'avait fait Andréa Bescond avec les chatouilles . ou même Sarah Succo, sur un sujet moins proche avec les éblouis.
Car si l'intrigue de Slalom est forcément irriguée par son histoire intime, la sève autobiographique est totalement mélangée à une fiction qui renvoie le film loin du démonstratif et du film à thèse.
Car en abordant la question des abus sexuels sur mineurs dans le milieu du sport sous l'angle d'une fiction aussi pudique qu'intense, Charlène Favier fait de son long métrage un bel objet de discussion et de sensibilisation sur cette problématique qui est d'autant plus d'actualité depuis que le mouvement me too a réussi à faire libérer la parole des victimes .
Et en même temps, elle réusit en même temps une oeuvre qui a le souci d’éviter tout manichéisme est très loin des films démonstratifs dits "Dossiers de l'écran" comme il en fleurissait pas mal du temps de cette émission.
En insistant sur le côté trouble et terriblement ambigü de la relation entre une jeune championne de ski de 15 ans et son professeur qui va la placer sous une emprise dont elle aura beaucoup de mal à se sortir, Charlène Favier évite toute prévisibilité dans le scénario et surtout tout ces bons sentiments qui aurait fait capoter sérieusement le projet .
Ascendance, soumission, désir, honte, humilation: tous ces éléments viennent se mélanger dans une sorte de valse iniatique passionnante et terrifiante à scruter.
Un ballet auquel Jérémie Rénier, doté d'un magnétisme évident qui n'aura jamais été aussi fort et la jeune Noée Abita, encore mieux que dans Ava donne corps avec un talent fou, et auquel la mise en scène de Charlène Favier apporte une richesse indéniable.
En effet, en prenant le parti pris de tout filmer ( enfin presque tout sauf un seule courte séquence, on en parlera au cours de l'entretien à venir) du point de vue de sa jeune héroïne, la metteuse en scène, bien accompagnée de son chef opérateur, le brillant Yann Maritaud cherchent à mettre le spectateur à la place de Liz.
Toute l'action est vue par le regard de la jeune fille, forçant le spectateur à pleinement s'immerger dans le monde intérieur de Liz, au plus près de la réalité assez hallucinée qu'elle est en train de vivre; une sorte de vertige intérieur que la musique du groupe Low Intérieur accompagne avec un grand talent.
Un premier long éblouissant de maitrise, pour nous un des plus grands films de cette année 2020( ou peut etre 2021 si le film ne sort que l'année prochaine) qu'on regrettera simplement de ne pas avoir vu présenter sous les feux de la croisette, comme il était prévu très vite selon les dires de Thierry Frémaux lors du dernier festival Lumière.
En abordant la question des abus sexuels sur mineurs dans le milieu du sport sous l'angle d'une fiction aussi pudique qu'intense, Charlène Favier fait de son long métrage un bel objet de discussion et de sensibilisation mais aussi et surtout un grand film de cinéma ! pic.twitter.com/Fu89zY0CQX
— Baz'art (@blog_bazart) November 5, 2020