Médecin de nuit : la pépite noire et bouleversante d' Élie Wajeman
Ne lésinons pas sur le suspens : Médecin de nuit, le troisième long métrage d'Elie Wajeman est sans aucun doute le film vu en octobre dernier à la " Sélection Cannes 2020 du dernier Festival Lumière" qui nous aura fait le plus d'effet, et pourtant la sélection était fort belle!
Elie Wajeman est un réalisateur qui nous avait déjà emballé avec les formidables Alyah en 2012 et le pourtant mal aimé Les anarchistes en 2015 monte encore un cran au dessus deux deux précédents avec ce film épatant de maitrise et de virtuosité.
Médecin de nuit colle au basque d'un médecin de nuit dont on ne sait pas s'il est un ange ou un démon et dont la chaotique vie personnelle et professionnelle l'entrainera une nuit où il ira au bout de sa destinée .
Ni blanc, ni noir, ce médecin de nuit, Mikaël accompagne les drogués en souffrance (on le surnomme d’ailleurs le Saint des Toxicos) tout en conservant une certaine méfiance devant les éventuelles iruptions de violence que le manque ou le sevrage entraine chez eux.
Unité de temps (toute l'action du film se déroule en une seule nuit), mais aussi unité de lieu (on ne quittera pas ce Paris nocturne aussi mystérieux qu'inquiétant et pratiquement jamais la voiture du médecin de nuit qui est autant son refuge que sa perdition) donnent à ce Médecin de Nuit une tension et une densité constante.
Médecin de nuit est un film sans gras aucun ( 1h22 qui passent en un éclair) et qui entraine le spectateur dans un grand huit émotionnel dont il aura bien du mal à se défaire
Du crépuscule à l’aube, Mikaël le médecin et son cousin Dimitri pharmacien semblent se regarder plonger dans un précipice que seul le premier semble vouloir cesser de creuser .
Tous deux ssemblent aller vers un chemin d’autodestruction, même si l’un d’entre eux semble déjà avoir passé le point de non-retour et tenter d'entrainer avec lui l’autre vers le précipice.
Comme il l'avait fait dans ses deux précédents longs métrage, Elie Wajeman mélange les genres avec une grande fluidité ( de la chronique sociale au polar sous haute tension) et garde ses obsessions pour les liens de famille toxiques et la frontière ténue entre illégalité et immoralité .
Le Paris qu'on voit dans Médecin de Nuit est peu vu au cinéma, ou se cotoie dans un même coin de rue humanité (très beaux moments volés avec une équipe d'humanitaires aidant les sans abris) et séquences de grande violence .
S'inscrivant dans les pas du cinéma du Nouvel Hollywood des années 70 ( on pense à Mean Streets ou au Flambeur de Karel Reisz ), en mélangeant une approche naturaliste avec une stylisation très soigée, Médecin de Nuit est évidemment porté par son acteur principal, un Vincent Macaigne totalement transfiguré et vraiment étonnant en un AL Pacino des seventies qui serait catapulté dans un Paris des années 2020 rongé par le trafic de Subutex.
Loin de ses rôles de paumé amoureux flirtant toujours un peu sur le fil du burlesque, Vincent Macaigne, plein d'une rage contenue qu'on sent prête à exploser à tout moment, apporte toute son humanité à un personnage parfois à la limite de l'illicité.
Elie Wajeman nous livre une oeuvre d'une intensité rare dans le cinéma français actuel, tant elle agrippe son spectateur pour ne jamais le lacher, alors qu'on devine le dénouement, forcément tragique et inéluctable comme dans tout grand film noir digne de ce nom .
Un très grand film noir et un très grand film tout court qu'il ne faudrait pas rater en salles dès mercredi prochain.
A noter aussi que le film est actuellement projeté en avant première dans toute la France, dans le cadre du festival Télérama dont on a parlé il ya quelques jours
Un médecin de nuit mi-ange mi-démon dont la chaotique vie familiale et intime va l’entraîner à travers une nuit qui va l'amener toucher le fond. #medecindenuit l'excellent film noir de Elie Wajeman avec un @VincentMcaigne éblouissant sort en salles mercredi prochain pic.twitter.com/fFopqW71hF
— Baz'art (@blog_bazart) June 8, 2021
@VincentMcaigne , très loin de ses récents rôles chez Lafitte ou Mouret, habite de son intensité nerveuse le puissant #medecindenuit un film noir, tendu et très stylisé qui confirme tout le talent d'Elie Wajeman.. une belle manière de cloturer les AP Cannes de #Lumiere2020 pic.twitter.com/77m0IbzYpI
— Baz'art (@blog_bazart) October 18, 2020