Rencontre cinéma «Iris et les hommes» : Caroline Vignal & Vincent Elbaz
Après l'incroyable succès d'Antoinette dans les cCvennes, Caroline Vignal a retrouvé Laure Calamy pour son troisième long métrage « Iris et les hommes », à l'affiche des cinémas depuis mercredi dernier.
Dans le film, qu'on a vu un peu avant sa sortie en salles lors du festival du film de Royan, on suit une galerie de personnages, de rencontres, de situations fines et savoureuses où les questions de consentement et de désir partagé sont abordées avec suffisamment de malice et d'intelligence pour tenir l'intérêt du spectateur.
La réalisatrice et son acteur principal Vincent Elbaz étaient présents sur Lyon en décembre dernier, nous les avons interrogés sur ce film à cette occasion :
Notre Rencontre avec la réalisatrice et l'acteur Vincent Elbaz.
D'où est parti le projet de ce Iris et les hommes ?
Caroline Vignal. Lors d'une soirée entre copines en fait... Un soir, une amie m'a confié s'être inscrite sur un site de rencontres.
Cela peut paraître banal, mais je n'avais jamais entendu personne en parler de manière aussi franche et directe.
J'étais persuadée que ces plateformes étaient l'apanage de gens de moins de 30 ans voulant draguer et multiplier les aventures.
Or mon amie était une femme de plus de 50 ans, plutôt très éduquée, un peu bourgeoise…
Et ce qu'elle m'a raconté m'a beaucoup amusée.
Sans doute parce qu'elle parlait de manière très drôle des « dick pics », vous savez ces selfies pornographiques masculins qu'elle recevait au bureau sur son téléphone, ces après-midi passés chez ce danseur de flamenco avec qui elle fumait des joints…
Venant d'elle, ça me semblait totalement décalé...
Pour cette amie, s'inscrire sur un site comme cela, c'était passer de l'autre côté du miroir, comme l'Alice de Lewis Carroll.
Elle parlait d'une « Cité des hommes », en référence au film " la cité des femmes "de Fellini : un univers parallèle peuplé d'une quantité infinie d'hommes… J'ai aussitôt eu l'impression qu'un film pouvait naitre de cette histoire.
Une fois rentrée chez moi, je me suis inscrite à mon tour, pour me rendre compte et mener mon enquête.
Rire de la libido qui s'éteint dans un couple, c'est un sujet délicat, qui peut facilement s'abîmer dans un propos grivois ou moralisateur. Aviez-vous conscience de cet écueil à éviter ?
Caroline Vignal. Non, parce que je ne pense pouvoir être ni l'une ni l'autre. Je tenais beaucoup à ce que le film reste une comédie.
Et que les spectateurs puissent comprendre la démarche d'Iris, même si eux-mêmes n'agiraient jamais de la sorte.
Le film parle du désir féminin mais surtout de la difficulté de faire durer un couple…
Vincent Elbaz. Oui bien sur, notamment à cause de l'absence de désir.
Le mari d'Iris, que je joue, est un type un peu mystérieux.
Je l'ai trouvé touchant dès la lecture du scénario.
C'est quelqu'un qui aime profondément Iris et se sent blessé. Mais s'il y a du ressentiment, c'est qu'il y a aussi du sentiment.
C'est un beau personnage, un père formidable, auquel on ne peut pas reprocher grand chose à part d'être tout le temps derrière son ordinateur ( rires), bref un personnage traité avec une subtilité que je lis rarement dans les scénarios que je recois .
Caroline Vignal. J'ai choisi Vincent Elbaz parce que je voulais « l'homme idéal des années 2020 » : il est beau, il est cool, il a tout pour lui…
Pourquoi ne couchent-ils plus ensemble ? C'est le grand mystère. Avec un acteur dont la désirabilité serait moins absolue, on comprendrait. Mais là ?
Le fonctionnement du désir au sein des couples me fascine, car on ignore comment il naît ou s'évanouit. Les gens rechignent toujours à se confier sur leur vie intime, parce qu'elle implique une autre personne. Alors ils mentent et prétendent, dans les sondages, faire l'amour trois fois par semaine…
Quelle a été votre relation de travail avec Laure Calamy ?
Vincent Elbaz. J'ai adoré travailler avec elle. C'est une actrice à l'énergie folle, très inventive, avec une palette incroyable de ressources intérieures. Elle est capable de passer du rire aux larmes en un claquement de doigts. C'est un feu d'artifice sur le plateau.
Elle a un jeu d'attaque, à la John McEnroe. Face à elle, il faut répondre en développant un jeu harmonieux, en creux. Sinon ça n'a pas de sens.
Caroline Vignal. Laure peut tout jouer. Elle est vraiment bouleversante, car elle sait être à la fois très drôle et très charnelle. Rares sont les acteurs comiques à être à ce point chargés en sensualité.
J'ai voulu créer un personnage assez loin de ce qu'on connaît d'elle. Par sa gestuelle, sa manière de se déplacer, elle incarne une femme très différente de ce qu'elle a interprété précédemment.
« Antoinette dans les Cévennes » a été une aventure véritablement extraordinaire pour elle et moi. C'était son premier véritable grand rôle au cinéma, un César…
Et pour moi qui revenais à la réalisation après une très très longue coupure, le succès d'Antoinette a été un événement très fort.
Retravailler avec Laure relevait de l'évidence. D'ailleurs, pour Iris, j'ai essayé de réfléchir à d'autres actrices, pour ne pas céder à la facilité… mais j'ai très vite lâché l'affaire tant elle m'a apparu d'une évidence folle !
« Iris et les hommes » de Caroline Vignal, avec Laure Calamy et Vincent Elbaz. Durée : 1 h 38, sortie depuis le 3 janvier.
Propos extraits de notre rencontre avec l'équipe du film le 12 décembre 2023 et du dossier de presse du film
Merci à Pathé Lyon et à Diaphana films
Crédit : Fabrice SCHIFF, photographe pour Baz'art