Baz'art  : Des films, des livres...
11 mars 2025

Rencontre avec Hélène Vincent, toute jeune comédienne de... 81 ans!!

 

Lorsqu'on évoque le nom d’Hélène Vincent,  surgit immanquablement dans les esprits -en tout cas ceux des baby boomers et même de leurs enfants, vu que le film a été multi rediffusé à la TV- l’image de Marielle Le Quesnoy avec ses kilts, son serre-tête et sa réplique culte : « C’est lundi, c’est raviolis. »

C'est d'ailleurs cette phrase là qu'un journaliste lyonnais- pas nous promis- présent lors de la conférence de presse du film On ira (voir chronique) le 21 février dernier n'a pas manqué de prononcer à la comédienne assise  en face de lui.

Et de lui demander si Madame Vincent n' en avait pas marre qu'on lui rappelle cette phrase et ce rôle des que quelqu'un la croise, ce à quoi elle n'a pas manqué de rétorquer qu'elle ne pouvait pas avoir des regrets,   vu ce qu'elle devait au film de Chatliiez  :   " Je ne peux pas me plaindre que tout le monde me parle de ce rôle, puisque regardez même vous le faites.  Je suis collée à jamais à ce rôle c'est ma chance et ma croix en même temps si je peux dire.  Vous savez,  quand j’ai tourné dans La Vie est un long fleuve tranquille, je désespérais du métierDeux ans auparavant, j’avais triomphé à Avignon avec Liberté à Brême, et après ça, rien. Plus de projets, plus d’Assedic, plus rien.  J’ai failli tout arrêter. Tourner avec Étienne Chatiliez a été une grande chance,  et en même temps, je n'avais pas la pratique de la célébrité, j'étais un peu troublée et j'avais l'impression de ne pas être tout à fait à ma place », reconnaît-elle.  Car le fait qu’on me propose ensuite systématiquement de dupliquer ce personnage, pathétique et ridicule, m’a blessée et déçue. J’étais bien sotte de penser que, en commençant une carrière au cinéma à 41 ans, on allait m’offrir des rôles importants comme j’en avais eu au théâtre. »

De ce  personnage de bourgeoise coincée, un brin bigote, qui l’a révélé au grand public et lui a ouvert tardivement les portes du cinéma,  cette comédienne de théâtre au jeu subtil aura par la suite le plus grand mal à se défaire. 

Les premiers rôles au cinéma se font très rares,  et c'est sur le tard avec  Stephane Brizé dans  "Quelques heures de printemps" en 2012 et François Ozon dans " Quand vient l'automne" l'an passé , que la consécration va arriver : "« J’ai bien fait de tenir et de vieillir car de façon étonnante, depuis quelques années, je donne envie à des réalisateurs et réalisatrices d’utiliser ce que je suis devenue. Faire une carrière au cinéma à la fin de ma vie, c’est comme si je réalisais mon rêve de petite fille ! », s’amuse-t-elle.

Cette profusion de rôles importants a été comme une divine surprise  pour elle parce que comme elle nous le confie avec une vraie gourmandise :  c’est "rarissime que l’on écrive des rôles principaux pour des femmes âgées," convient-elle. "Encore aujourd’hui, à partir de 40 ans, les actrices glissent sur le grand toboggan de l’oubli, même si elles ont été de sublimes jeunes femmes. »

 

Et pourtant on la voit de plus en plus en tête d'affiche, notre chère Hélène.

C'est encore le cas dans  "On ira" , un road trip  particulièrement émouvant sur le suicide assisté, qui sort en salle ce 12 mars où elle incarne le personnage principal. 

Comment Hélène s'est retrouvée sur le projet, ? « En fait, j'ai été émue et en même temps intriguée par la capacité que la réalisatrice Enya Baroux manifestait à lier l'humour et le chagrin », confie-t-elle. A la différence de son personnage, qui n'ose pas dire à ses proches pourquoi elle tient à voyager avec eux jusqu'en Suisse, Hélène Vincent a livré ses intentions à ses deux fils, qui ont accepté de se porter garants auprès de l'Association pour le droit de mourir dans la dignité, dont elle est membre depuis longtemps. « Ce n'était pas une chose facile », nous confie-elle avec pudeur.

Cependant, le choix de jouer dans le film d'Enya Baroux n'a pour elle rien de profondément engagé : "Non, ce choix de rôle n' est pas un acte politique car je ne vois pas " On ira"  comme un film militant. Il soulève simplement une question qui se pose à beaucoup d’entre nous et aborde un sujet que nous ne pouvons pas ignorer. Mais cette histoire illustre, jusqu’au bout, un acte de vie."

 

Hélène Vincent avec notre photographe Fabrice SCHIFF

 

Contrairement au film de Stéphane Brizé pour lequel Hélène avait échangé avec quelques personnes concernées par la fin de vie  :  " Pour "On ira, je me suis contentée de me fier à ce que Enya avait écrit car le scénario primait.  Je ne prépare jamais beaucoup mes rôles, vous savez, 

J’ai peut-être, depuis l’enfance, un imaginaire assez ouvert qui me permet de me projeter dans beaucoup de personnages plus ou moins proches de moi. Par ailleurs, je pense être suffisamment âgée pour que la vie m’ait remplie d’un certain nombre d’émotions, de rencontres, qui font que je n’ai pas beaucoup de travail à réaliser en amont. Je me contente d’apprendre le texte très minutieusement. Cela permet au personnage d’infuser jour après jour.."

Quand on creuse un peu plus avant la réflexion sur le sujet, Hélène Vincent poursuit sans que l'on y force plus que cela : « Je laisse aller ce que la vie m'a apporté", éclaire-t-elle simplement."

J'ai vécu assez d'années pour avoir éprouvé que vivre pouvait être très heureux, très jubilatoire, très tragique. Dans "On ira", je trouve que je ressemble à ma mère comme deux gouttes d'eau. Je me souviens comment elle marchait à petits pas avec la tête en avant,et les membres  pleins d'arthrose.

Ce sont mes provisions, les images que j'ai gardé des gens qui m'ont entouré et c'est ca en premier que je mets dans mes rôles.».

Cette liberté qu'elle ressent dans la façon d'appréhender un rôle, Hélène Vincent le compare à un vrai petit miracle.  : « C'est une liberté qui est très douce, dépeint-elle. En tant que femme et comédienne, j'ai eu pendant longtemps le sentiment de ne pas avoir les bons outils. Je ne me trouvais pas gracieuse. Mais, Dieu merci, depuis un certain nombre d'années, tout ça est complètement tombé.

Je suis attentive à ce que je désire vraiment et je me fiche de ce que les gens peuvent penser. Je me fie à mon ressenti, et c'est à partir de là que je choisis, par exemple, de tourner tel ou tel film, de lancer des travaux chez moi et d'abattre un arbre du jardin, de partir faire un voyage, comme l'an dernier au Danemark avec ma sœur. Après avoir été obsédée par le faire, j'apprends à être. »

Hélène Vincent avec la réalisatrice Enya BAROUX - photographe Fabrice SCHIFF

 

Ce qui surprend quand on entend avant ou après la rencontre Enya et Hèlène échanger ensemble, c'est que le vouvoiement est de rigueur. 

Hélène a tenu  du début à la fin du tournage et même après à ce que le vouvoiement soit de mise, « comme, en règle générale, les gens avec lesquels je travaille, ça donne de la souplesse à la relation. Mais certaines comédiens ou comédiennes ont du mal avec cela, comme Josiane Balasko sur le tournage de quand vient l'automne qui trouvait que je me la jouais (rires)"

Et sinon, si on revient au film "On ira", on veut savoir quelle réaction Hélène a eu devant le long métrage d'Enya Baroux lorsqu'elle l'a découvert la première fois,  elle ne se dissimule pas  :

"Je n'ai découvert  le film d'Enya qu’au Festival de l’Alpe d’Huez et, à l’image du public, je suis passée du rire aux larmes pendant toute la projection.

Au-delà de me réjouir en tant que spectatrice, cela m’a fait dire que je pouvais encore continuer un petit peu encore comme actrice"

Voilà un avis qu'on ne peut que partager, chère éternelle Madame Vincent. tant les personnages qu'elle incarne depuis quelques années au cinéma sont des énigmes dont on ne se lasse pas de dépister les non-dits et les jardins secrets.

 

On ira

Un film d'Enya Baroux

Au cinéma le 12 Mars 2025

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