Rencontre avec Julia Piaton :" les pères sont de plus en plus présents dans l'éducation de leurs enfants"
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Elle est trois fois à l'affiche des salles de cinémas en ce mois d'avril, rien que cela.
Julia Piaton est à la fois authentique et sensible dans Le mélange des genres- retrouvez notre article sur le film ici.
Dans cette savoureuse comédie sociétale de Michel Leclerc, l'actrice y donne la réplique à Benjamin Lavernhe, deux ans après avoir déjà partagé l'affiche ensemble dans les Engagés d'Emilie Freche.
Mais on la retrouvera aussi dès le 30 avril à l'affiche de deux autres longs métrages différents, "Les règles de l'art", une comédie d'arnaque basée sur des faits réels de Dominique Baumard dans lequel elle donne la réplique à Melvil Poupaud et Sofiane Zermatti et "Une pointe d'amour" , remake du film belge e Hasta la Vista dans lequel elle joue une jeune femme sur fauteuil roulant plongée dans un road movie de tous les possibles.
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Si on pense qu'elle occupait déjà le premier rôle féminin de la comédie d'aventures luchiniesque en diable 'le secret de Kheops' en février dernier, on se dit que 2025 semble être l'année de la consécration pour cette comédienne qui n'est pourtant pas née de la dernière pluie.
En effet, depuis Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu ? de Philippe de Chauveron (2014), le visage de Julia Piaton nous est familier : la professeure dans Les Petites Victoires,de Mélanie Auffret, près de 1 million de spectateurs; la fille du boucher dealer dans la série Family Business, sur Netflix ou bien encore dans un autre registre, et pour pour ceux qui comme nous vouent un culte à ce film … rappelons qu'elle a été nominée pour le césar du meilleure espoir féminin pour Les choses qu'on dit, les choses qu'on fait.d'Emmanuel Mouret dans lequel elle impose une trop rare mais précieuse présence.
On l'a vu aussi l'an dernier sur Amazon Prime, dans Citadel, un spin-off made in Italy de la série des frères Russo, une sorte de dystopie d’espionnage new tech.
C'est dire à quel point la demoiselle est éclectique et prolixe. Et à en croire Dominique Baumard, que l'on a interviewé à ce sujet la semaine dernière lorsqu'il est venu présenter son film et qui nous a confié que "Julia possèdait un vrai goût pour la comédie et j’aime sa façon de jouer au présent en cherchant toujours la manière la plus simple de vivre les situations." tous les metteurs en scène semblent actuellement se l'arracher!!
Bref l'occasion idéale d'en savoir plus, et on a profité de deux temps de rencontre différent, un point presse à Lyon et un autre à Avignon, toujours autour du film de Michel Leclerc pour la passer sur le grill de nos questions à quelques jours d'intervalle.
Je suis une vraie enfant de la balle, j'ai grandi avec ça. J'accompagnais ma mère en tournée, elle nous trimballait avec elle, on dormait sur les sièges du théâtre…
Mais du coup, pour moi c'était un environnement qui était presque trop familial. J’étais très empêchée à cette époque, je me sentais illégitime de faire le même métier.
Et je me rends compte que ce rapport au jeu m’a fascinée. J’ai mis vachement de temps à me dire que je voulais faire ça, tout simplement parce que j’ai été marquée par la notoriété de ma mère.
Ça va avec le métier, et c’est très bien, mais pour un enfant, avoir un parent connu, ça n’apporte rien, à part faire attention au fait qu’on puisse être regardé, et donc développer un truc un peu bizarre de penser beaucoup au regard de l’autre.
Puis, j’ai réalisé que tout le monde s’en foutait complètement de moi, que j’allais prendre des cours de théâtre et puis qu’on verrait bien ce qu’il allait se passer.
Très rapidement, j'ai été rattrapée par le destin parce que j'ai senti que j'aimais écrire, certes, mais surtout raconter des histoires.
J'ai réalisé que ce quotidien avec ma mère m'avait énormément structurée… et que ce n'était peut-être pas la peine de vouloir à tout prix faire différemment !
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Avec le cinéaste Michel Leclerc lors des rencontres du Sud d'Avignon.
Pour répondre à votre question, je vais faire mon Fabrice ' Lucchini avec qui j'ai récemment tourné : «L’origine est fixe, l’identité se construit » c'est pas de moi mais du dramaturge Wajdi Mouawad.
Autrement dit, c’est le métier avec lequel il faut lutter.
Tu essaies d’aligner ce qui t’intéresse dans la vie avec ton travail. Mais c'est un fait établi : les directeurs de casting viennent la plupart du temps chercher ce qui marche.
Michel Blanc, que je regrette tant, me disait lorsqu'on a tourné ensemble les petites victoires qu’il avait dû faire Tenue de soirée pour pouvoir sortir un peu de la troupe du Splendid.
Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu ?, personne n’aurait pu imaginer que ça allait faire ce score, on était hyper heureux, et après, effectivement, on me proposait de passer plutôt des auditions pour de la comédie.
Mais je ne voulais pas qu’on me sorte de cette case comme un caprice, j’avais vraiment envie de jouer autre chose.
Oui, parce que j’ai été nommée aux César pour le film de Mouret, alors que je ne m’y attendais pas, que j’avais peu à faire et que je trouvais que c’était difficile : tu ne te dis pas que tu vas être nommé pour un film où tu tournes cinq jours.
Donc, quand ça m’est tombé dessus, j’étais hyper heureuse. Et le film est magnifique avec Camélia Jordana, Niels Schneider et Vincent Macaigne : il s’est passé un truc très beau.
Et que ce soit dans les engagés ou dans le film de Mélanie, c'est ca qui me plait avant tout, le fait d'aborder des sujets graves, avec cette lame de fond qui est de communiquer les uns avec les autres.
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Oui bien sur, dans ce film, que je suis très fière de défendre, Michel pose la question du couple par le prisme de la libération de la parole de la femme et décrit un couple , très tolérant l'un envers l'autre.
Cela n'a rien non plus d'exceptionnel, ils sont pour moi à l'image de pas mal de couples que je côtoie. , je trouve que la société change et que les pères sont de plus en plus présents notamment dans l 'éducation de leurs enfants.
Si je vais sur ma petite histoire personnelle, je dirais que mon compagnon s'occupe énormément de mes enfants que je suis éloignée sur une longue période pour un tournage.
J'étais très heureuse d'incarner ce couple là, qui est une proposition du couple d'aujourd'hui c'est à chacun de trouver son équilibre mais c'est vrai que c'était sympa d'inverser les rôles..
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Oui, vraiment, Le mélange des genres pose pas mal de questions sur la place qu'on occupe à l'intérieur d'un couple.
Pour moi,, il y a énormément de tendresse entre eux dans la façon dont Michel - et Baya -Kasmi la coscénariste l'a croqué et c'était vraiment super de le jouer avec Benjamin que je retrouvais avec grand plaisir pour ce film.
A peu près tout ce que je vous ai dit avant.
Cette femme là est libre, heureuse de faire son métier , elle est mère mais n'est pas que cela..
D'ailleurs c'est marrant car c'est bien la première fois ou je joue une mère de famille mais que je ne suis jamais sur une scène avec des enfants je les croise mais je n'en fais pas plus je l'ai dit à Michel d'ailleurs ( rires)
Mais promis, on le voit pas, mais elle s'en occupe bien de ses enfants dès que la caméra n'est pas là (rires)...
Ah ah, j'espère juste que je ne vais pas lasser les gens à force de squatter les écrans tous les mercredis..
Non comme on dit souvent c'est vraiment les hasards du calendrier et de la programmation car j'ai tourné ces films pas forcément à la suite des autres et en effet ils sortent tous en même temps..
Ce sont des films très différents, même si tous un peu portés par la comédie plus ou moins marqués mais à chaque fois de beaux roles avec de belles propositions de jeux...
C'est vrai que j'ai eu la chance de pas mal tourner ces dernières années sans trop m’arrêter juste pour m'occuper de mes enfants entre deux tournages..
Je ne peux pas vraiment dire pourquoi les metteurs en scène ont eu sans doute plus envie de tourner avec moi, en tout cas pourquoi j'ai eu plus de propositions interessantes ces derniers temps, je ne maitrise pas tous ces paramètres là.
Peut etre qu'avec la quarantaine, je suis plus détachée par rapport à obtenir des roles et que du coup cette sérenité est un avantage pour le metteur en scène ' rires)... Mais bon je sais à quel point tout est très versatile dans ce milieu donc la j'en profite bien je suis très heureuse de cette période mais je sais bien que rien n'est acquis...
Je ne la connaissais pas mais j’ai découvert
une actrice dotée d’un tempérament comique
naturel. Julia a dans l’œil quelque chose qui
frétille et un ton qui se décale naturellement.
La savoir aussi à l’aise dans ce registre m’a
beaucoup aidé. Quand j’arrivais à la faire
rire alors qu’elle n’avait pas forcément vu le
potentiel comique de mon personnage, cela
me réjouissait car je l’admire comme actrice
et je connais son humour. Évidemment, ce
n’est pas parce que ça rigole sur le plateau
que c’est forcément drôle à l’arrivée mais c’est
encourageant quand on tente des choses
Propos recueillis à Lyon et à Avignon les les 24 mars et 4 avril 2025
Remerciements : les rencontres du SUD, Fabrice SCHIFF (©photo), le cinéma le Pathé Lyon, le Pacte...
Le film Le mélange des genres sort en salles ce 16 avril 2025