CHARLÈNE FAVIER | Interview pour son film OXANA
C’était soir d’avant-première au Comoedia ce vendredi 11 avril avec la présentation d' un biopic très documenté Oxana- voir notre chronique du film ici même, de la réalisatrice Charlène Favier.
Dans Oxana, qu'on pourra découvrir en salles dès mercredi prochain, Charlène Favier (Slalom) raconte l'humain derrière les actions coup de poing du mouvent FEMEN
Elle brosse le portrait de l'artiste et activiste qui, fragilisée par son exil forcé et son éviction du mouvement, s'est donné la mort à l'âge de 31 ans.
La cinéaste était présente en amont de la séance pour répondre aux questions de la presse locale.
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Je crois que mes films en tout cas les trois que j'ai réalisé seront toujours hantés par des personnages de femmes ambivalentes en proie à l’adversité du monde.
Il y a slalom mais il y a aussi la fille qu'on appelle une fiction que j'ai faite pour arte sur l'emprise, adapté du roman éponyme de Tanguy Viel.
Mes héroïnes sont toutes les trois des combattantes, des survivantes. Fragiles et fortes à la fois, leurs parcours mènent toujours vers la résilience.
C’est aussi une façon pour moi de questionner ma propre intimité, mon propre parcours de vie. Bon après le prochain je vais peut etre aller voir d'un autre chemin car cela va quand même finir par me fatiguer ( rires)
Mon adolescence a été mouvementée, oscillant entre des phases d’autodestruction et des découvertes initiatiques exaltantes.
Je crois qu’Oxana a vécu une période similaire où plusieurs proches se sont suicidés. Les traumatismes, la survie, l’idéalisme, ces thématiques ont fait partie de ma vie, de celle d’Oxana et de mon film aussi.
Mais après un film très intime comme Slalom, j'avais moins envie d'exposer ma vie et du coup je suis allé vers un pays l'Ukraine et un sujet les Femen a priori vraiment éloignées de moi.
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Ah je n'en connaissais rien du tout, ou tout comme .(rires)
Pendant la période ou le mouvement a été médiatisé en France, les Femen, je suis passée à côté, mais je crois que je ne suis pas la seule dans ce cas, non? ( rires)
J'ai tout appris en travaillant sur le film.
J'ai lu et vu pas mal de choses sur les FEMEN notamment le documentaire du réalisateur suisse Alain Margot Je suis femen que j'ai eu la chance de rencontrer ensuite pour ce projet, même si malheureusement cet homme formidable est décédé en 2023.
Mais plus que les FEMEN c'est la figure d'Oxana qui m'a passionné.
C'est lorsqu'on m’a dit que l’une des fondatrices était une artiste qui avait fait les Beaux-arts à Paris, j’ai commencé à lire pas mal de choses sur elle.
J'ai été alors captivée, pour ne pas dire comme possédée par cette fille qui était très ambivalente, incandescente, mystique et surtout héroïque, parce qu’elle avait une force et un courage incroyables.
La phrase qui la résume le mieux je trouve, et elle est dans le film c'est celle ci : " l'art c'est la révolution".. Il faut savoir que les autres FEMEN n'aimait pas forcément son coté artiste, elles trouvaient que cela brouillait un peu le message militantisme, mais elle, mêlait étroitement les deux et c'est cela qui était passionnant à montrer dans le film
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L’écriture a pris plusieurs années, d’abord avec Antoine Lacomblez avec qui je me suis lancée dans une enquête intime pour tenter de faire revivre Oxana.
Dès les premières semaines de travail, la charge émotionnelle a été très forte, trop forte, et nous étions submergés par la matière documentaire.
J’ai donc laissé reposer cette première mouture pour repartir à zéro avec l’aide de Diane Brasseur, romancière et scripte pour le cinéma.
Nous avons repensé toute la structure pour laisser plus de place à la fiction et nous avons inventé la dernière journée d’Oxana à Paris : le 23 juillet 2018. Nous nous sommes demandé à quoi ressemble le dernier jour d’une vie ? Son errance parisienne est un contrepoint à sa vie en Ukraine. Plus la journée avance, plus les souvenirs d’Oxana
sont douloureux et sombres. A Paris, plus Oxana se souvient, plus elle se dissout en elle-mêm
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Oxana était habitée par la religion. Elle vient d’une famille orthodoxe très croyante, comme beaucoup de familles en Ukraine à cette époque.
Mais c’était aussi une petite fille particulière, originale, dans son monde. Sa mère m’a dit un jour que c’était « une vieille âme dans un corps d’enfant », elle l’appelait aussi « ma petite Jeanne d’Arc ».
Depuis toute petite, elle avait une fibre spirituelle et artistique très puissante. Je crois qu’elle peignait pour se créer un endroit à elle, justement.
Elle s’est réfugiée dans la religion comme elle l’a fait avec la peinture. Elle a été repérée très jeune pour son talent et l’Église lui passait des commandes. Ils ont vu en elle un don.
Je pense sincèrement qu'il existe quelque chose de très mystique dans cet acte créatif. Je Et j’ai surtout vu en elle une petite fille appelée par Dieu pour sauver le monde.
C’est comme ça en tout cas que j'ai tenu à la montrer dans le film.
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Je n’imaginais pas tourner avec des actrices françaises et nous avons
débuté le casting en Ukraine depuis la France ! J’ai vu beaucoup de filles en zoom, fait beaucoup de call back…
Le processus a été long. Tatiana Vladi, la directrice de casting, s’est réfugiée à Paris au début de la guerre et nous avons continué le casting qu’elle avait déjà commencé pour nous en Ukraine.
Elle connaissait toutes les actrices ukrainiennes. À un moment, j’avais l’impression que je n’allais jamais trouver celle qui pourrait incarner mon Oxana.
La guerre s’intensifiait et c’était extrêmement frustrant, les sessions zoom étaient parfois interrompues par les coupures d’électricité ou des alertes de missiles.
L’enjeu était énorme pour toutes les filles qui vivaient dans l’angoisse au quotidien. Finalement, c’est dans ce contexte et après avoir vu une centaine d’actrices ukrainiennes,
que j’ai découvert Albina.
Nous avons fait une série d’improvisations par zoom et elle m’a bouleversée et hypnotisée par son naturel, son étrangeté, sa beauté singulière, sa force aussi. Ce jour-là, on a aussi trouvé, Inna, Sacha et Anna qui sont toutes des actrices de théâtre très
connues en Ukraine.
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Une fois qu'on les a choisi, toutes les comédiennes sont toutes venues à Paris et on a travaillé ensemble, avec la caméra. À leur arrivée, l’émotion était à son comble. Elles venaient de faire vingt-quatre heures de bus, l’espace aérien ukrainien étant fermé,
et nous sommes tombées dans les bras les unes des autres.
! Pourtant, elles sont arrivées à Paris dans le même état de traumatisme que celui d’Oksana et ses amies. Elles venaient de subir un an et demi de guerre, elles étaient exténuées psychologiquement...
Mais elles "étaient aussi et surtout prêtes à tout pour se battre afin de raconter cette histoire.
Il fallait d’abord apprendre à ces comédiennes ce qu’était cette révolution internationale qu’elles ne connaissaient pas.
Compte tenu de la situation, toutes sont même devenues militantes. Nous avons tourné les scènes de l’Est en Hongrie, mais nous n’avons pas pu faire côtoyer acteurs ukrainiens et russes. Nous avons beaucoup travaillé ensemble sur le texte et sur les postures...
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Oh ça, j’ai beaucoup appris de mes actrices, ces filles sont exceptionnelles à tous les niveaux..
Elles ont beaucoup apporté d’elles, de ce qu’elles savaient d’Oksana.
Les actrices m’ont énormément apporté sur le plateau, ce sont des interprètes et des artistes incroyables.
On a beaucoup discuté ensemble, c’était une véritable rencontre, très forte. Elles sont incroyables
Propos recueillis à Lyon le 11 avril 2025
Ecoutez l'interview en entier sur le podcast enregistré le 11 avril 2025
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Charlène Favier itw pour le film oxana by Philippe HUGOT
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