Rencontres du Sud : Oxana, Charlène Favier : Sous son sein, la grenade
/image%2F1371318%2F20250320%2Fob_a63fce_oxanaaaa.jpg)
Ukraine, 2008. La jeune Oxana et son groupe d’amies multiplient les actions, slogans peints sur le corps et couronnes de fleurs dans les cheveux, contre un gouvernement arbitraire et corrompu. C’est la naissance d'un des mouvements les plus importants du XXIe siècle : FEMEN. Réfugiée politique, artiste, activiste, Oxana franchira les frontières et militera sans relâche pour les droits des femmes et la liberté, jusqu'à risquer sa propre vie.
Révélée par Slalom, excellent premier long métrage hélas trop peu vu car sorti entre deux confinements, Charlène Favier s’appropriait avec énormément de puissance le sujet du harcèlement moral et des agressions sexuelles dans le milieu du sport, en l’occurrence celui du ski.
Avec Oxana, Charlène Favier abandonne la sphère individuelle pour attaquer un système patriarcal dans son ensemble, via le récit de la vie brève mais intense d’Oksana Chatchko, cofondatrice, avec Anna Hutsol et Oleksandra Chevtchenko, du mouvement Femen, en avril 2008.
Vent debout contre la corruption, le tourisme sexuel dont l’Ukraine est victime et la dictature voisine du Belarus de Loukachenko et de la Russie de Poutine, l’organisation va prendre de l’ampleur et trouver l’écho recherché auprès des médias, notamment en manifestant seins nus à coup de slogans peints sur leurs poitrines.
/image%2F1371318%2F20250322%2Fob_6f5f36_photo-4-2024-rectangle-productions-2.jpg)
D’une légère substitution de lettres, d’Oksana à Oxana, Charlène Favier nous raconte ainsi son Oxana, une jeune femme hypersensible et jusqu’au-boutiste qui ne croyait qu’en deux choses, l’art et la révolution, deux concepts majeurs qui peuvent changer le monde
Oxana, qui va en tout cas, c'est ce que le film nous montre, être la première du collectif à décider de montrer sa poitrine pour mieux mettre en lumière les interventions des Femen, d’après sa phrase « notre corps est notre armure, nos seins des armes de combat ».
Un peu comme Slalom, ce film est une œuvre militante, qui questionne la fin de l’innocence à travers la condition des femmes et le poids du patriarcat.
Sauf que cette fois, il s’agit de conjuguer intimité et contexte politique, car derrière ce personnage envoûtant et complexe, se profile aussi l’histoire d’un groupe qui prend conscience de sa force politique et entreprend de lutter pour la reconnaissance de ses droits.
Oxana, déçue par la religion traditionnelle, entre dans le mouvement femen comme on entre en religion, elle qui voulait, petite, entrer au couvent. Elle y connaîtra l'épiphanie que la religion ne lui offre plus.
Le film alterne temporellement entre le 23 juillet 2018, date du vernissage des icônes peintes par Oxana, et son parcours de 2003 à 2018, par un enchâssement brillant de flash-backs et de renvois à son existence.
Une construction narrative- co écrit avec la romancière Diane Brasseur, portée par une mise en scène presque hallucinatoire par moments, et qui insiste sur le cheminement quasi christique de cette jeune femme, à l'éducation très religieuse qui entretiendra jusqu'à la fin de sa courte existence une relation ambigüe avec la religion, continuant de peindre des icônes tout en protestant véhément contre les dérives d'un pouvoir et d'une société patriarcale trop inféodé aux institutions religieuses.
/image%2F1371318%2F20250320%2Fob_393536_photo-3-2024-rectangle-production.jpg)
/image%2F1371318%2F20250320%2Fob_22565a_photo-6-2024-rectangle-production.jpg)
Avec ce vibrant Oxana, Charlène Favier dresse le portrait d’une jeune femme pure, intègre et intransigeante, une véritable artiste qui a tenté aussi de faire triompher ses idées par la politique et s’est heurtée aux terrifiants pépins de la réalité.
Charlène Favier parvient à recréer cet enchevêtrement de parcours, en donnant une véracité documentaire à tout élément dans le film : la langue, la distribution composée d’actrices ukrainiennes toutes formidables, l’époque précisément reconstituée.
Le film de Charlène Favier ne serait pas aussi puissant sans la prestation de la sidérante Albina Korzh, qui parvient malgré la radicalité et le mal être permanent de son héroïne la rendre particulièrement attachante ...
Oxana, de Charlène Favier, avec Albina Korzh, le 16 avril 2025 au cinéma.
Distribué par Diaphana Films
Film sélectionné en compétition des Rencontres du Sud
Retrouvez la critique en podcast
/https%3A%2F%2Fi1.sndcdn.com%2Fartworks-UqzTDMigcnkkmZ5V-oTatIg-t500x500.jpg)
critique oxana by Philippe HUGOT
Critique audio de Oxana, de Charlène Favier, avec Albina Korzh, le 16 avril 2025 au cinéma. Distribué par Diaphana Films Film sélectionné en compétition des Rencontres du Sud