D'après une histoire vraie , le chef d'oeuvre de De Vigan adopté mollement par Polanski
Le DVD du film "D'Après une histoire vraie" réalisé par Roman Polanski, adapté du roman de Delphine de Vigan, avec Eva Green et Emmanuelle Seigner sort ce mardi 6 mars 2018.
Dans ce formidable roman publié à la rentrée littéraire de 2015, De Vigan jonglait avec une maîtrise et une habileté inouie entre autobiographie et fiction, la frontière entre les deux, étant parfaitement entretenu par l'auteure et ce jusqu'à la dernière phrase.
Ce roman psychologique courroné du prix Renaudot et le prix Goncourt des lycéens ,d’une densité exceptionnelle était aussi une formidable histoire de prédation flirtant avec l’usurpation d’identité qui finissait en huis clos oppressant de ces intrigues, qui renvoie au meilleur du genre- on pense beaucoup au Misery de Stephen King, surtout dans sa dernière partie.
On comprend largement que le roman ait plu à Roman Polanski, maitre en relation trouble en double maléfique et les mises en abyme, notamment dans le génial "The ghost writer " ou bien encore son dernier film l'excellent Venus à la fourrure.
On peut facilement deviner en filigrane, dans cette histoire d'un artiste à succès qui doit faire face aux cruautés du public - notamment des méchancetés balancées sur Facebook- et de l'opinion publique, une sorte de catharsis pour un cinéaste particulièrement controversé pour ses déboires particulièrement graves avec la justice.
Les jeux de miroirs entre l'auteure Delphine et son double "Elle", entre le dialogue et l'intrigue, entre son oeuvre et la réalité. auraient pu et du donner lieu à un grand film plein d'ambiguité et de tension, or on s'aperçoit vite que la mayonnaise ne prend pas et qu'il manque justement de ces ingrédients là pour que le thriller psychologique remplisse sa mission.
Le film opte pour un ton qui flirte parfois avec le grand guignol et le burlesque tranchant trop avec le réalisme d'autres séquences.
"D'après une histoire vraie" n'atteint en fait jamais les modèles du genre (on pense au cinéma hitchockien ou Misery ou même de l'excellent Swimming-Pool de François Ozon) car ne parvient pas à imposer le climat paranoïaque qu'il aimerait instiller, peu aidé par une bande originale assez terne signée du récent oscarisé Alexandre Deplat.
Malgré un travail d'adaptation du livre de Vigan co-écrit avec Olivier Assayas, le grand Polanski n'a pas réussi à exploiter le matériau de départ, tant il semble un peu hésiter à plonger dans les abisses que promettait son histoire et restait à la surface des choses, laissant du coup le spectateur hors de ce qu'il voit à l'écran.
On sauvera la prestation plutot convaincante Emmanuelle Seigner- contrairement à une Eva Green qui en fait vraiment trop- une description du microcosme parisien plutot savoureuse - avec un Vincent Perez en François Busnel et Elisabeth Quin en .... Elizabeth Quin- mais il n'en demeure pas moins que ce thriller psychologique avait tout pour plaire sur le papier reste une belle déception...