Théâtre : Les Gratitudes- Fabien Gorgeart adapte Delphine de Vigan avec grâce
Après la très belle réussite qu'était Stallone, il y a deux ans, Fabien Gorgeart adapte avec autant de bonheur Les Gratitudes de Delphine de Vigan, récit d’un apprentissage de la perte, qui questionne la perte du langage.porté par les comédiennes Catherine Hiegel et Laure Blatter aux côtés du musicien et comédien Pascal Sangla.
Michka, parolière de talent, n’est plus très sûre d’elle, seule dans son appartement, elle se rend bien compte qu’elle perd la boule. Marie, la jeune femme qui lui rend souvent visite tente de la rassurer, elle perd seulement des mots, pas la tête. Michka sait bien qu’elle ne peut plus vivre seule.
Dans sa nouvelle demeure, un EHPAD bien tenu et bien fréquenté, la vieille dame fait connaissance avec Jérôme, un jeune orthophoniste qui lui fait travailler sa mémoire défaillante. Michka n’a plus qu’un désir avant de mourir, retrouver la trace de la famille qui l’avait recueillie et cachée pendant la guerre.
A un tournant important de sa vie, Marie passe souvent voir Michka, car la jeune femme sait ce qu’elle lui doit. Jérôme, lui, devrait se réconcilier avec son père avant qu’il ne soit trop tard. Michka, Marie, Jérôme, entre ces trois-là, un lien ténu se tisse, chacun donnant à l’autre la force d’affronter la solitude de l’existence.
Quand Delphine de Vigan a proposé à celui qui est aussi réalisateur de la cinéaste- le touchant la Vraie famille- d’adapter Les Gratitudes, elle lui a aussi confié avoir eu envie de faire de cette matière d’abord une pièce de théâtre. Mais elle n’a pas osé aller au bout de son geste d’écriture et a finalement choisi de l’écrire sous forme de roman.
L’écriture de Delphine de Vigan est dynamique tendre et intelligente. Comme chez Emmanuèle Bernheim, ce sont des « romans vivants » à entendre autant qu’à lire.
. Les Gratitudes est avant tout une expérience de la déconstruction du langage, de la perte du rapport à l’autre qui en découle. qui trouble notre rapport au réel et la perception de ce qu’on voit.
Difficile de raconter l’émotion qui submerge le spectateur dans cette adaptation pleine de grâce particulièrement sensible dans les dernières scènes de la pièce et devant la prestation absolument bouleversante de l'immense Catherine Heigel, au delà de l'excellence tant ses balbiuetements, ses renoncements, sa fatigue de parler sans se faire comprendre sonnent cruellement vrais .
« Les Gratitudes » est un texte d’une douceur apaisante, une écriture légère qui affronte le naufrage de la vieillesse, l’inquiétude de donner la vie et la difficulté d’être un fils.
Une très belle adaptation théâtrale, où une fois n'est pas coutume, la pièce nous a paru plus réussi que le roman d'origine !
Théatre des célestins- salle célestine
Les Gratitudes
🖋️ Delphine de Vigan / Fabien Gorgeart
🎭 Laure Blatter, Catherine Hiegel, Pascal Sangla
📆 29 nov. > 9 déc. I Célestine
→ prenez place theatredescelestins.com