Le baiser, le beau récit romantique et historique de Sophie Brocas
« Elle vit dans le long bloc un poème résolument moderne, une déclaration d’amour à la vie, à l’ardeur, à l’union. Elle fut frappée par cette sculpture naïve, presque enfantine, ou brute dans son rendu, qui vous pénétrait instantanément du sentiment de la passion absolue. On était loin des visages éplorés, des drapés, des tourelles, des ferronneries. On était dans un ailleurs, celui des êtres liés par l’indicible des sentiments. Camille prit le temps d’observer chaque détail. C’était un bloc carré, trois fois plus haut que large. Un bloc de calcaire gris un peu grossier parsemé d’éclats noirs. Les amants y étaient pris entiers. Nus. Enlacés étroitement. Fondus l’un d’en l’autre. »
Une jeune aristocrate russe, exilée pour sympathie socialiste, doit se refaire une santé morale chez une vieille tante.
Même petite nièce du grand Léon Tolstoï, une jeune aristocrate russe doit attendre sagement un bon parti qui lui fera de beaux enfants. Mais nous sommes à Paris au début du XXe siècle et à Paris, dans cette époque en plein bouleversement, une jeune fille bien née peut prendre des cours à la facultés auprès d’un séduisant médecin, une jeune fille bien née peut même fréquenter les artistes modernes et tomber amoureuse d’un sculpteur dont tout le monde parle. Mais cela la vieille tante ne le sait heureusement pas.
Paris 2017. Camille Ravani, avocate d’affaire talentueuse se retrouve avec un drôle de dossier. Son voisin, directeur des cimetières de la ville de Paris lui expose un problème qui lui tient à cœur. Une statue sur le caveau d’une jeune femme morte en 1910, risque d’être descellée et envoyée en Roumanie.
Même si la statue est signée Brancusi, le pionnier de la sculpture moderne, et peut se négocier entre 20 et 30 millions de dollars, cette affaire est très loin des dossiers internationaux qu’elle traite habituellement.
"Les mots sont des coquillages vides. Ils ne rendent pas compte à leur juste mesure du chatoiement, de l emportement, des cieux prodigieux que je découvre entre ses bras."
Mais c’est sans compter la puissance de l’art et le romantisme niché dans le cœur de cette célibataire endurcie. Le baiser de Brancusi vaut bien que Camille fasse une pause dans sa carrière, quitte à chambouler toute sa vie.
Ecriture claire et précise, d’une époque à l’autre, rapidement le lecteur, en empathie totale avec Tania et Camille, ne peut plus quitter les deux héroïnes. « Le diable c’est la contingence, le beau c’est l’essence » disait Brancusi.
Romantique, féministe, historique et …juridique, ce roman de Sophie Brocas est totalement passionnant.
LE BAISER/Sophie BROCAS Editions Julliard