Cuban network : le coup bas d'Olivier Assyas
J'ai découvert Cuban Network, le dernier long métrage du prolixe Olivier Assayas, qui sort en salles ce mercredi, sans savoir que ce dernier en était l'auteur...
En effet, le film a été projeté lors du dernier Ciné Brunch du cinéma Comoedia, où l'on n'a connaissance de l'identité du film qu'on va voir uniquement au moment où sa projection commence et il se trouve que concernant ce film, seul le générique de film donne l'identité de son réalisateur..
Comme j'étais passé totalement à coté des informations concernant son tournage et son passage en compétition à Venise ( où il s'est fait globalement détruire), j'ai pris connaissance de l'existence de ce long métrage en le visionnant, ce qui est particulièrement rare me concernant..
Le problème est que pendant les deux heures que dure le film, je n'ai jamais songé un instant qu'Assayas était derrière la caméra, ce qui signifie ainsi qu'il n'a pas réussi à apposer son style et sa patte alors même que j'ai du voir tous les films de ce réalisateur depuis son premier long Désordres...
En même temps, cela peut être vu d'un point positif car signifie aussi qu'Assayas est là où on ne l'attend pas, car après des drames fantastiques et très français dans sa forme avec Kristen Stewart ou/et Juliette Binoche ( Sils Maria, Personal Shoper ou le très bon Doubles vies) il part à Cuba pour tourner un thriller d'espionnage basé sur les relations très froides entre Cuba et les USA.
Lors d'une fresque particulièrement ambitieuse n'hésitant pas faire des allers retours entre passé et présent, on suit la destinée de cinq officiers de renseignement cubains arrêtés en Floride en 1998, reconnus coupables d'espionnage et autres activités et emprisonnés. Ces cubains parti de la Havane pour Miami sont en fait recrutés pour une une association contre les révolutionnaires de Cuba pour faire des actions pour libérer le pays.
Même si on n'apprend la finalité de ce groupe qu'à la moitié du film- dans un revirement inattendu mais qui ne fonctionne pas vraiment- ce groupe de Cubains a organisé dans les années 90, depuis Miami, un réseau d’espionnage pour le compte du régime de Fidel Castro.
Bref, le sujet était passionnant et très peu connu de nous autre européens, mais on ne peut pas dire que le résultat soit à la hauteur de nos attentes. Assayas opte pour une profusion de personnages ( certains qu'on suit quelque temps avant de voir disparaitre de l'intrigue d'un coup et ne plus revenir ) ainsi qu' une narration très éclatée.
Le réalisateur a pris le parti de nous laisser trop dans l’ignorance des activités de ces espions ( comme l'étaient les proches de ces derniers), tant et si bien que lorsque la réalité sur leurs activités apparait on a n peu de mal à en comprendre les tenants et les aboutissants et on ne sait plus trop qui est pro ou anti castriste.
Le film a visiblement été difficile à tourner et à monter, et cela se voit avec le montage, particulièrement souffreteux- certaines séquences finissent par un fondu au noir mal à propos- qui confère au récit un côté trop décousu et trop brouillon.
Les enjeux du film sont trop complexes pour ce film qui donne trop l'impression de survoler certaines séquences et certains personnages sur lesquels il aurait fallu s'attarder .
Cuban Network manque de fluidité dans ses transitions et doit parfois se contenter de cartons temporels ( 5 ans plus tard ect) ou d'une voix off venue de nulle part pour expliquer ce qu'il n'a pas réussi à nous montrer autrement.
A l'heure où les séries ne cessent de proposer des oeuvres complexes, qui approfondisent les personnalités des différents protagonistes, ce film est la preuve si besoin était qu'un long métrage de moins de deux heures apparait ainsi un terrain de jeu trop restreint et peu convaincant pour ce genre de sujets.
Dommage pour le casting 5 étoiles ; notamment Edgar Ramirez, qu'Assayas a retrouvé après "Carlos", ( une oeuvre d'un autre impact, mais qui pour le coup était une série), qui possède vraiment un charisme fou ou la cubaine Ana De Armas, déjà vu dans à couteaux tirés , très bien et très cinégénique aussi) sans oublier Penelope Cruz en mater dolorosa ou Gael Garcia Bernal, que des acteurs dont l'implication aurait mérité une oeuvre plus équilibrée et plus aboutie...
"Cuban network " reste plaisant à regarder ( on ne s'ennuie jamais) et nous apprend quand même certaines choses sur cette partie de l'histoire géopolitique trop connue, mais déçoit par rapport à l'ampleur du sujet et les forces en présence sur le papier..
Finalement heureusement que je n'étais pas au courant de l'existence de ce film avant de l'avoir vu, cela m'aura évité une grosse déception !
A croire que le milieu de l'édition germanoprontin sied mieux à Assayas que la géopolitique américaine...