Critique cinéma: Sentimental, la comédie caliente et cinglante pour cet été 2021
Après des années de vie commune, Julio et Ana traversent une crise dans leur couple.
Jusqu’au soir où Ana décide d'inviter leurs voisins du dessus à dîner, sans prévenir Julio, qui ne les porte pas dans son coeur.
Son grief : le bruit qu'ils font chaque soir lors de leurs ébats déchaînés. Au fil de ce dîner, la routine de Julio et Ana se heurte aux moeurs plus que libérées de leurs voisins : les langues se délient, les secrets se dévoilent et les masques tombent.
On n'avait plus trop de nouvelles en France depuis 2016, du cinéaste espagnol Cesc Gay, de façon assez étonnante d'ailleurs, puisqu'après quelques comédies plus ou moins anecdotiques, il restait sur un beau succès, Truman belle ode à l'amitié avec le toujours épatant Ricardo Darin et Javier Camara.
On le retrouve cette année avec Sentimental, adaptation pour le grand écran de sa pièce de théâtre à succès Los vecinos de arriba (litt. Les voisins du dessus). Unité de temps, de lieu, quatre personnages, et seul importent véritablement les dialogues et les interactions entre eux.
Les films basés sur des pièces de théâtre donnent des résultats très inégaux allant du meilleur (par hasard, Le dîner de cons, Le prénom, Le limier) au pire (Momo, ma femme s'appelle Maurice, Amoureux de ma femme) .
Force est de constater que Cesc Gay s'en sort ici très bien grâce au brio du texte départ, réflexion drôle et plutôt maligne sur la vie conjugale et la sexualité, l'amour et l'apparence.
Les dialogues mi cinglants mi ironiques possèdent une réelle efficacité comique et le cinéaste assume pleinement la théatralité du projet sans jamais chercher à noyer la puissance du texte sous les effets de manche.
Si on pense un peu au Carnage mis en scène par Polanski, en moins méchant quand même, les références assumées du cinéaste viennent surtout des maîtres de la screwball comedy, comme Billy Wilder, Howard Hawks, Ben Hecht, Ernst Lubitsch et bien d'autres .
Sens du rythme, dynamisme de la réalisation: tout est fait pour que le coté théâtre filmé un peu ampoulé et poussiéreux ne soit jamais convoqué.
Par ailleurs, Cesc Gay a magnifié la direction d'acteurs avec un quatuor qui n'est pas le même que celui qui jouait sur les planches à Madrid mais qui s'en donne visiblement à cœur joie.
Javier Camara, que le réalisateur retrouve avec un plaisir visiblement partagé 5 ans après Truman, campe un personnage un peu cynique et moqueur qui va doucement revenir sur ses positions et Alberto San Juan est parfaitement à l'aise dans le rôle du voisin pompier manifestement très porté sur la chose.
Mais les plus rejouissantes prestations de cette comédie gentiment caliente viennent sans doute des comédiennes : alors que la ravissante actrice argentine Griselda Siciliani met énormément de nuances dans le rôle a priori un peu effacé d'Ana, Belén Cuesta vue dans la série La Casa de Papel est épatante en voisine psychologue, qui finit par agir comme thérapeute pour tenter de régler les problèmes conjugaux de ses voisins
Ce sont les comédiens, prenant du plaisir à dire les dialogues percutants de l'auteur et réalisateur qui rendent l'expérience très agréable et font de ce Sentimental un très sympathique divertissement pour cet été 2021 .
Sentimental
Un film espagnol de Cesc Gay
Sortie : 11 août 2021
Avec Javier Camara, Griselda Siciliani, Belén Cuesta, Alberto San Juan
Distribué par Wild Bunch