Rencontre cinéma avec Maxime Roy, réalisateur du film Les Héroïques
Maxime Roy est un jeune réalisateur très prometteur qui sort ce mercredi en salles son premier long Les héroïques qui sort au cinéma ce mercredi 20 octobre.
On a énormément aimé le film et pu rencontrer le réalisateur à Montélimar lors du dernier festival de l'écrit à l'écran, voici un petit rendu de nos échanges avec ce cinéaste et de son passionnant projet :
François Creton, un acteur et un personnage exceptionnel
J'ai rencontré François Creton, à l'origine de ce film et du court métrage Beautiful Loser dans ma vie personnelle. C'était le père de ma compagne de l'époque. Très vite, il m’a touché.
J'ai peu à peu appris le connaître avant que se dessine l'envie de raconter une histoire. Je suis allé de moi même dans des centres, des réunions d'alcooliques.
Ecrire un film autour de sa vie, on en parlait comme ça et petit à petit, on a basculé vers l'écriture du scénario.
Un jour il est venu me voir en me montrant une vidéo de son père, qui s’était filmé durant les derniers mois de sa vie alors qu’il était atteint d’un cancer.
Dans ces vidéos laissées en héritage, il y avait un témoignage d’amour très fort envers son fils, c'est de ces vidéos là qu'est parti l'écriture du film Les Héroïques
Comment devenir un mec bien quand on a pas toutes les cartes en main
J'ai très vite écrit une histoire centrée sur Michel, le personnage principal largement inspiré de la vie de François.
Quand j'ai rencontré François de suite, j'y ai vu un homme bourré de contradictions, de fragilités, quelqu’un de profondément humain, qui se battait pour être quelqu’un de bien.
Nous avions, François et moi, beaucoup d’interrogations : comment cette emprise pouvait-elle être répercutée sur l’homme qu’il était devenu, ou qu’il allait devenir ?
Comment pouvait-il faire le deuil d’une histoire violente qu’il avait traversée étant jeune et devenir celui qu’il avait envie de devenir ? Et surtout, comment parvenir à devenir un mec bien ?
Et je crois qu'on montre à travers le film que Michel est la preuve qu'on pouvait garder la foi et devenir un homme meilleur même quand c'est difficile.
Faire un film pour transfigurer le réel
L’acte de faire un film permet peut-être de transfigurer des incompréhensions et de tenter de trouver des chemins de traverse pour qu’ensuite, ça aille mieux.
il y a évidemment quelque chose de l'ordre de la réalité et en même temps tout est faux parce que tout est réécrit. Rien n'est réel, mais le sentiment que traverse le personnage est à mon sens toujours complètement juste.
J'aime partir du vécu et inventer des fictions où nos personnages sont placés dans des dispositions plus extrêmes que dans la vie, où tous les traits scénaristiques possibles permettent de créer des tensions dramatiques.
Parler des invisibles, des gens à la marge
Le film parle d’une population difficile à définir et à identifier, ces gens à la marge, un peu « déviants », montrés du doigt pour leurs dépendances, parce que, d’une certaine façon, ils expriment leur mal être.
A un moment donné, ils s’écartent de la société et tombent dans la précarité.
Michel ne rentre pas dans les cases, il fait partie d’un autre temps, il ne s’adapte pas à une société difficile où les codes ont changé, mais il a des qualités, un savoir-faire.
Cadrer ses films pour faire corps avec ses acteurs
La caméra fait partie intégrante du jeu et en cadrant, c’est mon regard qui accompagne le film. J’ai l’impression de faire corps avec ce qui se dit, on le vit tous ensemble. Quand je cadre, je sens toute l’équipe présente derrière moi, comme si on était tous collés à la caméra.
En cadrant, on est dans le ressenti émotionnel direct. Je ne cadre jamais de très loin et la caméra est souvent proche de la scène.
Du coup j’entends la scène avec mes oreilles, rarement avec un casque. Avec les acteurs, c’est un contrat de confiance immédiat.
Sortir de la salle en ayant un peu moins mal
J'ai la sensation que majoritairement, le film donne de l'espoir aux gens.
Il y a un acte de résistance face à la morosité. J'ai souhaitais qu'en sortant, on ait envie d'aimer les gens.
J'ai l'impression que mon travail est accompli. Surtout que François lui-même est enfin dans la vie. Il a accédé à une sorte de sagesse.
Aujourd'hui, c'est lui qui prêche la parole, même dans ses groupes d'Alcooliques Anonymes.
Le film lui a permis de combattre et son combat a permis de faire le film.
Il sort en salles à un moment où François est là, vraiment là.
Bref, les héroïques c'est un film qui ne plombe pas à mon sens, il a vocation au contraire à élever les gens, j'espère qu'on a réussi cela ..