Nouveautés poche : nos trois derniers coups de 🖤

 Les nouveautés livres de poche  sortent en nombre en ce mois de mai  2023. 

Difficile de faire le tri dans cette multitude de parution. 

Heureusement, on en a sélectionné trois pour vous , trois valeurs sures qui nous ont particulièrement épatés : 

 Pete Fromm le lac de nulle part Gallmeister 

 Le pitch : Trig et Al, frère et soeur, jumeaux, n’ont plus de nouvelles de leur père, depuis 2 ans, quand ce dernier réapparait dans leur vie pour les embarquer dans une « dernière aventure »: naviguer en canoë les lacs du Canada pendant un mois. Dès leur arrivée, les tensions apparaissent et un malaise quant aux réactions du père s’installe.

La citation "Chaque matin, nous propulsons le canoë sur la glace, le cœur battant à tout rompre. »

Pourquoi on a  aimé ?

En relisant le paragraphe ci dessus, je me disais que ça pourrait évoquer un roman de David Vann. Sauf que Pete Fromm a un univers beaucoup moins sombre et qu’il consacre une place beaucoup plus importante aux dialogues qu’à l’introspection.

On n'avait hélas pas du  tout accroché à son tout premier roman réédité en 2021 Indian Creek (et ses histoires de chasse),  et on avait  peur que le côté « nature writing » surpasse le reste et que cela m’ennuie. Dès les premières pages, Pete Fromm a balayé très vite toutes nos réticences.

Si les paysages du parc national canadien sont présents comme les scènes de pêche et de camp, ce sont les relations familiales qui sont au coeur du lac de Nulle part comme dans le très beau Mon désir le plus ardent.

Je ne vais pas trop spoiler mais comme cela tourne mal, le suspense augmente au fur et à mesure alors que les personnages principaux oscillent entre doutes, colère, rancœur, peurs, courage et espoir.

Le Lac de nulle part est un huis clos à ciel ouvert, écrit dans une langue organique.

Une fois de plus, la plume de Pete Fromm m’a embarqué et j’ai eu bien du mal à refermer ce roman pendant que je le lisais.  Dans le cadre majestueux des ter res sauvages près de la frontière canadienne, Pete Fromm nous livre un formidable roman sur le fragile équilibre familial.  

 2La fin des hommes, Christina Sweeney Baird- Gallmeister 

 Le pitch :

L’histoire commence à Londres, 5 jours avant le début du fléau en 2025 et par la « voix » de Catherine qui a un enfant de 3 ans et se demande, pressé par son mari, si elle est prête à une nouvelle FIV.

Dans le chapitre suivant, Amanda à Glascow, médecin aux urgences à l’hôpital, constate un décès très soudain d’un homme, puis 3 puis 5. Elle alerte tout de suite les instances médicales soupçonnant un virus nouveau et très contagieux mais on la prend pour une folle.

Le lecteur vit au fil des jours la propagation du virus (mortel et qui ne touche que des hommes) à travers le monde et par la voix de différents personnages féminins. Face au deuil et à une société complètement bouleversée, reconfigurée, chacun réagit à sa façon.

Pourquoi on a aimé ?

Paradoxe d’un fléau qui s’étend partout et donc d’un monde utra connecté mais alors que tout le monde vit la même chose, l’auteure suggère la solitude, l’isolement de chacun (parfois même réelle comme ce bateau qui va rester deux ans au large de l’Islande ou cette cabane dans la forêt dans laquelle un ado est obligé d’aller se réfugier pour ne pas être contaminé).

La fin des Hommes interroge bien entendu sur la place des hommes dans la société (aussi bien dans la sphère publique que dans la sphère privée), sur le deuil, sur jusqu’où un état peut aller dans l’ingérence personnelle (ici au niveau des naissances) pour sauver un pays, une société.

Comme Catherine, Amanda et d’autres femmes sont des personnages récurrents, la fin des Hommes arrive à allier à une tragédie universelle une intimité profondément bouleversante. 

3. Les derniers jours des fauves, Jérôme Leroy ( Folio)

 Le pitch 

 L’intrigue des derniers jours des fauves se déroule au cours de la dernière année de mandat de la présidente Nathalie Séchard et la situation du pays est grave entre pandémie, canicule, Gilets Jaunes, conflits internationaux et montée en puissance de l’extrême droite.

La France décrite dans le livre de Jérome Leroy est un pays à bout de souffle, étrillée par des années de crises multiples et dont la Présidente s’apprête à lâcher le pouvoir.

 Pourquoi on a aimé 

En 2011 Jérôme Leroy  marquait les esprits avec Le Bloc passant en revue, sur l'espace d'une nuit, l'ascension durant 25 ans du Bloc Patriotique, un mouvement d'extrême droite, un roman noir corrosif et sulfureux qui avait été brillamment adapté au cinéma par Lucas Belvaux dans  ce qui est sans doute son meilleur film à ce jour "Chez nous".

Jérôme Leroy  n'a eu de cesse dans ses romans de décrire le crique  politique et les batailles impitoyables que des gens se livrent pour la conquête du pouvoir et continue le faire dans son dernier roman, les derniers jours des fauves, aussi crépusculaire et féroce que ne le laisse entendre son titre.

Jérôme Leroy arrive à raconter mine de rien la société et le régime politique dans laquelle nous vivons dans un roman noir suffocant et  trépidant, sans le moindre  temps mort., avec des personnages très bien campés et des  dialogues finement ciselés.

Le monde raconté par Leroy ressemble forcément un peu au notre, mais de façon forcément plus exacerbée et terrifiant ( du moins c'est ce qu'on se dit en se rassurant)..

Peu de sentiments, de psychologique, beaucoup de  lucidité, pas mal de noirceur, une dose de cynisme , une once de violence, mais aussi pour faire passer les choses avec finesses un peu de poésie, littérature et d' amour :  les ingrédients sont parfaitement dosés pour faire des  derniers jours des fauves  un roman qui force l'admiration à tous les niveaux...