Baz'art  : Des films, des livres...
23 août 2024

Rencontre avec Jonas Trueba, réalisateur de Septembre sans attendre

Après avoir sorti, en 2020,Eva en août, divagation funambule dans un Madrid estival,, le cinéaste espagnol Jonás Trueba en retrouve le décor, la comédienne et scénariste (Itsaso Arana, qui est à la ville sa compagne), mais propose cette fois le contre-pied de cette échappée.

Septembre sans attendre - voir notre chronique du film - débute par cet instant où un couple vient de prendre, après « quatorze, quinze ans » de vie commune, la décision de rompre.  Mais comment se quitter avec savoir-vivre quand deux existences sont entremêlées ? « Les couples devraient fêter les séparations plutôt que les unions » : d'une phrase entendue, adolescent, dans la bouche de son propre père, le réalisateur tire une comédie douce-amère qui infuse longtemps dans l'esprit du spectateur et dont les protagonistes  tentent d'organiser une réception pour célébrer la fin de leur idylle en trinquant.

Un prétexte romanesque à réflexion sur les mythes et les drames conjugaux qui nous habitent, et l'envie de rester alerte et de s'aimer sans gravité.

Comment est née l’idée de ce couple qui veut organiser une fête de séparation ?

L’inspiration vient d’une phrase de mon père, que j’ai entendue quand j’étais ado. Soudain, je me suis dit que cela pouvait être le prémice d’un film.

C’est fragile, un peu une boutade. C’était une opportunité d’essayer d’en faire une comédie.

De plus, j’avais très envie de continuer à travailler avec Itsaso Arana et Vito Sanz.

En tant que spectateur, on ne sait jamais si c’est une bonne ou une mauvaise idée....

( rires) mais parce que moi même je n'ai pas de réponse à cela

Depuis des années, quand j’avais des amis qui se séparaient, j’évoquais l’idée.

Et j’ai constaté que c’était difficile, que la tristesse gagne au moment de la séparation. Peut-être que c’est mieux d’en faire un film sur cette idée que de faire cette fête en vrai ( sourires) !

Dans le film, c’est le père de l’héroïne, joué par votre propre père, le réalisateur Fernando Trueba, qui a l’idée…

C’est un concept un peu freudien peut-être  mais j’avais le désir de travailler avec mon père. Je l’admire beaucoup, j’ai pensé qu’il pouvait faire l’acteur. Il est très drôle dans la vie réelle. C’est un geste naturel.

Depuis des années, nous avons partagé beaucoup de choses et c’était le moment

Le film naît aussi de la relation que j’ai avec mon père, et de ma relation au cinéma à travers mon père. Dans le schéma des comédies de remariage classiques, le père est un personnage récurrent.

Il y a toujours un père, un mariage et une fête qui se déroule dans la maison du père. Le film, à notre échelle madrilène contemporaine, rejoue ces stéréotypes.

Vous questionnez également la place des femmes dans la comédie romantique à travers une discussion sur 'L’Amour est une grande aventure' de Blake Edwards. Pourquoi fallait-il inclure cette conversation ?
Depuis quelques années, on s’interroge sur la place des femmes dans la société, et dans le cinéma. Cela fait partie de mes conversations avec Itsaso, avec mes amies. On questionne certains films.

Depuis que j’ai rencontré Itsaso, mon regard a changé : à partir de La Reconquista, les personnages masculins ont cessé d’être le cœur de mes films

Je ne le fais pas parce qu’il faut le faire, mais parce que j’ai pu adopter le point de vue de ma compagne, qui s’est mélangé au mien.

Depuis Eva en août, je ne pense plus les personnages féminins de la même manière.

Comment s’est passée l’écriture du scénario à laquelle ont participé vos deux comédiens ?

Avec Itsaso et Vito, nous travaillons ensemble depuis quelques années. Ce ne sont pas seulement des acteurs, on peut partager beaucoup d’idées pendant tout le processus du film. En plus, il y a une espèce de mémoire. C’est le troisième film où ils jouent un couple.

C’est amusant de jouer avec cela. Les personnages sont différents, mais en même temps, à chaque film, on fait une variation.

Le film adopte un mouvement répétitif autour de cette annonce..Que vouliez vous montrer avec ce procédé?

La répétition était un élément central du film. Cette même phrase répétée devenait a force perdre de sa substance jusqu'à en devenir une sorte de boutade..a force de la répéter ale et Alex ne savent plus vraiment où se situer et commencent a avoir du mal à tenir cet argument..

J ai souvent joue avec la répétition : je tourne autour du même thème avec les mêmes acteurs dans les mêmes lieux...c était intéressant de faire ce coup ci de la répétition le fragment même du film...

Le film mélange les tons, alternant humour et de la gravité…

Le film peut fonctionner comme une comédie, mais j'ai voulu y mettre  beaucoup d’autres choses.

Par moments, c’est un peu une comédie dépressive. Il y a aussi des variations de rythmes et finalement, une forme de mélancolie. Le ton, c’est le plus important.

On essaie de créer un climat qui n’est pas réaliste, qui part de choses vécues pour aller vers autre chose.

En fait, on ne saura jamais vraiment tout à fait pourquoi ils veulent se séparer…

C’était important de ne pas faire un film avec des discussions dramatiques. Le spectateur doit travailler, imaginer et réfléchir sur ce couple.

C’est important de ne pas tout dire.

Votre film a été présenté à la Quinzaine des cinéastes à Cannes. Comment s’est passé le festival ?

Très bien, c'était ma  toute première fois au festival.

La Quinzaine est une section que j’aime beaucoup comme spectateur, qui a une histoire symbolique pour les cinéastes indépendants. C’est très surprenant, c’est la première fois que l’un de mes films voyage de cette manière. 

J'avais l'impression que les autres films de la sélection étaient assez lourds, sombre avec des thématiques tres fortes et que mon film somme toute bien plus léger et modeste a fait un peu de bien en contrepartie d'apres les échos que j'ai pu entendre ( sourire)

 

Septembre sans attendre (1 h 54), de Jonás Trueba. En salle le 28 août.

 Rencontre réalisée au cinéma le Comoedia le  MERCREDI 12 JUIN À 20H30 dans le cadre de la Quinzaine en salle.

Merci au cinéma le Comoedia et au distributeur ARIZONA FILMS

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