J’oublie tout : La quête du J pour devenir le S – Théâtre la Flèche (Paris)
À peine rentrées dans une cour beaucoup trop mignonne, les guirlandes lumineuses nous montrent le chemin pour échapper au froid. Les degrés remontent, nous arrivons à Montpellier en quelques secondes avec Julien Gallix qui nous accueille, met à l’aise les spectateur.rices dès l’entrée de la salle. Dans son dos, maillots, sweat-shirt et chemise blanche sont suspendus, comme si chacun représentait une étape de la vie.
Oasis en main, le comédien entame sa canette en même temps que le récit de sa courte vie : « Je m’appelle Julien Marie Gallix, j’ai vingt-huit ans, j’existe pas. ». Il n’existe pas, il n’est personne, il compte le nombre de followers sur son compte Instagram. Cela ne suffit pas pour devenir quelqu’un. Il ne sait pas encore quoi faire de sa vie.
Celle-ci tourne autour des copains et de sa twingo à tout faire… Jusqu’au jour où celle-ci lui fait découvrir le son d’un rappeur qui monte en 2014, un certain Jul.
C’est la révélation ! L’autotune devient symphonie sur scène et le rappeur, un guide. C’est la Vierge Marie qui le dit elle-même : Jul est l’Ovni, Julien devient alors « l’élu ». Sa dégaine, son verbe, tout fait sens pour le jeune homme qui se démène pour l’apercevoir lors d’un concert, se découvrant une volonté hors du commun. La même qu’il trouvait chez le rappeur, modèle de persévérance et d’authenticité. Dans sa quête, il apprend qu’il existe des milliers comme lui, une team Jul. L’amour pour son antihéros n’est point solitaire.
Mélant récit et fiction, J’oublie tout raconte comment on grandit et on se construit à l’aide de figure mythiques et d’idoles, non pas pour les imiter mais pour trouver sa place grâce à des échos de chansons ou de créations. Ces jeunesses venues du Sud de la France ou d’ailleurs, des parkings de zones commerciales, dans la veine de Chien de la casse (réalisé en 2023 par Jean-Baptiste Durand), tentent de se frayer un chemin entre les rêves inaccessibles qu’on leur vend, les projections des parents et le désir que sa vie ait un impact. S’il est novateur d’entendre Jul dans un théâtre, point besoin d’être fan, l’écriture séduit autant amateurs.rices comme curieux.ses.
La mise en scène de Louis Meignan est hyper sobre, juste le nécessaire pour accompagner le texte de Gallix et le voyage dans lequel il nous transporte, de la Paillade de Montpellier à Paris, en passant par le dôme de Marseille. Ici, Julien Gallix reste la révélation, provoque fous rires et crée une complicité avec le public dans la salle comble tant par sa spontanéité et sa sincérité touchante ! On reste bouleversée par ce que transmettent ses yeux !
Pour sa première création, Gallix épate par sa merveilleuse écriture, par sa capacité à casser les codes du théâtre en convoquant du rap, genre peu bienvenu il y a encore peu au sein des murs et Jul, dont le style était lui-même peu bienvenu au début. Rien qu’en 1h10, on s’est senti membre de la team Jul et ça fait un bien fou ! On souhaite des dates complètes jusqu’à la fin pour cette nouvelle tête (à la Mathilde Serrell) dont on suivra la suite de son parcours.
Crédits photos : DR
J’oublie tout
Écrite et interprété par Julien Gallix
Mise en scène par Louis Meignan
1h10
Les mercredis à 21h
Théâtre La Flèche (Paris 11ème)
Jade SAUVANET