Rencontre avec Mareike Engelhardt, réalisatrice de "Rabia"
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Mareike Engelhardt,
Avec son audacieux premier long métrage audacieux, « Rabia », en salles ce jour, la cinéaste franco allemande Mareike Engelhardt, explore le phénomène troublant de la radicalisation, en abordant les questions difficiles entourant l’extrémisme politique, la manipulation et la violence sexiste.
La cinéaste était venue ce mardi 12 novembre à Lyon au cinéma le Comoedia présenter son film autour de l’enrôlement par Daech de jeunes filles destinées à devenir les épouses des combattants.
Ce premier long-métrage lui a demandé plusieurs années de travail. «On a commencé en 2015. À l’époque, c’était facile de faire témoigner des femmes qui revenaient de Syrie. Elles avaient besoin de parler.»
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Au départ du projet la lecture d' un article de presse : "J'ai lu un article sur un jeune couple qui voulait faire exploser la tour Eiffel puis rejoindre le paradis. Je me suis demandé comment ces jeunes pouvaient passer de la liberté à la soumission. Et pourquoi ils le vivaient comme une libération. J'ai alors commencé à recueillir des témoignages de jeunes filles de retour de Syrie. Et j'ai compris à quel point ça nous concernait tous. Elles pourraient être nos voisines, des amies…" nous détaille t elle
Mareike Engelhardt a imaginé le personnage de Jessica, une aide-soignante de 19ans qui s’en va avec sa copine Leila. À l’arrivée à Raqqa, elle déchante.
Dépouillée de son portable, de tous ses effets personnels, elle est enfermée au milieu d’autres jeunes filles dans une maison tenue d’une main de fer par Madame. Elle devient Rabia, un nom qui renvoie à la colère, «mais qui veut dire aussi printemps en arabe».
Au début, elle se révolte. Puis elle entre dans le système, au point de devenir tortionnaire à son tour.
Jessica, une jeune femme dont la transformation d’une victime naïve en tortionnaire brutal est au cœur de « Rabia ». est brillamment interprété par Megan Northam,
Le voyage de Jessica symbolise la puissance insidieuse de la manipulation psychologique. « Pourquoi iraient-ils? Quelles sont leurs motivations? » la cinéaste nous a dit avoir "passé beaucoup de temps à analyser le psychisme de ces femmes, à comprendre comment les individus peuvent être radicalisés non pas par de grandes idées politiques mais par des relations intimes et la manipulation psychologique."
Le tournage a eu lieu de manière chronologique, avec comme actrices principales Lubna Azabal, qui incarne Madame, et Megan Northam, qui joue Rabia et décrochait là son premier rôle dans un long-métrage. Mareike Engelhardt voulait «un visage inconnu au cinéma», pour donner plus de force à ce drame qui a marqué également l’équipe. «On était bien préparés mais on ne s‘attendait pas à éprouver une telle émotion.»
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La recherche sur un sujet aussi controversé et sensible peut sembler intimidante, mais Mareike Engelhardt a trouvé le processus étonnamment simple. Elle attribue une grande partie de son succès à la volonté des femmes qui sont revenues de Syrie pour partager leurs histoires. « J’avais besoin de communiquer avec des femmes... elles étaient étonnamment heureuses de me parler. Il était donc vraiment nécessaire de partager leur histoire », raconte Engelhardt. Le film est construit à partir de ces histoires réelles, sans que rien ne soit inventé dans « Rabia ».
" Pendant la préparation, nous avons organisé des rencontres encadrées entre les comédiennes principales et des femmes ayant vécu dans des madafas. Ces rencontres ont été déterminantes pour les comédiennes qui ont compris l’ampleur de l’histoire et de leurs rôles. L’une de ces ex-membres de l’Etat Islamique était avec nous sur le plateau pour raconter aux figurantes comment elle avait vécu certaines situations qu’on retrouve dans le scénario. Ces séquences ont gagné en force et en véracité grâce à ce travail." nous détaille encore, tout à ses souvenirs de tournage.
En outre, la réalisatrice a travaillé en étroite collaboration avec une journaliste spécialiste du sujet qui avaient une connaissance approfondie de ces femmes, ce qui a ajouté plus de profondeur et d’authenticité à la narration.
Au centre de Rabia, se trouve le personnage de Madame, interprété par Lubna Azabal. Madame. Le personnage de Madame est basé sur une vraie femme marocaine qui a orchestré le système de domination féminine en Syrie, et Azabal avait suivi l’histoire de cette femme pendant des années.
Madame est une figure complexe et terrifiante, à la fois charismatique et effrayante. Engelhardt et Azabal partageaient un intérêt profond pour l’exploration des personnalités sombres et manipulatrices de ces personnages. «Nous partageons un intérêt très profond pour ces personnages sombres, ces personnages de leader, qui sont très intelligents et tout aussi horribles », s'est dit Mareike Engelhardt.
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Mareike Engelhardt espère que son film leur sera utile, car il encourage la vigilance face à l’extrémisme. « Il est aujourd’hui plus important que jamais pour les jeunes de réaliser ce que c’est d’être manipulés et radicalisés... Qu’il s’agisse de l’extrême droite ou de l’islam radicalisé... la pensée totalitaire binaire est une menace constante dans le monde dans lequel nous vivons. " A quel moment on prend un mauvais chemin et surtout pourquoi on décide de rester ? " Toute forme d'embrigadement, sous couvert de religion ou d'idées, reste un sujet central et brûlant. " affirme-t-elle.
Rabia avec Megan Northam, Lubna Azabal, Natacha Krief, sort en salles ce 27 novembre 2024.
Retrouvez notre critique du film ci dessous:
Rabia ; critique du film de Mareike Engelhardt - Baz'art : Des films, des livres...
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https://www.baz-art.org/2024/10/rabia-un-film-de-mareike-engelhardt.html