Rencontre avec le réalisateur Rachid Hami pour le film Pour la France
Dans « Pour la France », son deuxième film en tant que réalisateur, Rachid Hami honore la mémoire de son frère Jallal, noyé lors d'une épreuve d'intégration « un bahutage » dans le lexique de l'école miliaire Saint-Cyr.
Une épopée intime, qui se mue en film d'aventures, romanesque et pleinement maitrisé.
Narrée en trois volets, l'histoire de la famille Hami est étroitement mêlée à celle de la France, alors que l'intime et le politique se croisent.
Retrouvez notre chronique d'un film à voir en salles depuis mercredi dernier
Morceaux choisis :
Une épopée intime plus que film de procès
Casser les stéréotypes
"Mon envie était de casser les représentations attendues, en étant juste : qu'ils s'agissent des stéréotypes dont on souffre en tant que banlieusard et musulman ou qu'il s'agisse des étiquettes que l'on colle à l'armée.
Car il ne s'agissait pas non plus de faire le énième film à charge contre l'armée.
Cette institution n'est pas un bloc. Certains de ces militaires ont permis que l'enquête s'ouvre tout de suite et soit transparente. Ils se sont battus pour la dignité de mon frère. Et puis, dénoncer l'armée comme un "système" aurait été une façon de détruire le rêve de mon frère."
"Chacun de nous présente plusieurs facettes, avec son histoire personnelle, familiale et culturelle.
Aïssa est prêt à tuer et à mourir pour son idéal républicain et démocratique de la France, tout en restant profondément musulman.
Quand il porte l'uniforme de l'armée, il est revêtu d'un uniforme français. Mais c'est aussi le cas d'Ismaël qui s'habille du maillot de foot de Zidane."
Un casting fort et judicieusement choisi
Les acteurs sont le cœur d’un film, ils sont ce qu’il y a de plus important au cinéma.
Sur le plateau de Pour La France, j’ai eu le privilège et la chance de collaborer avec des acteurs et des actrices formidables. C’est rare de réunir autant de talents dans un film, que ce soient les acteurs confirmés ou les non professionnels.
Elsa Pharaon (NDLR: la directrice de casting du film ) et moi avons constitué une distribution cohérente dans le style de jeu : je voulais des actrices et des acteurs instinctifs, capable de viscéralement habiter leurs personnages.
Il y a dans la rencontre entre Karim Leklou et Ismaël la naissance d’un personnage inquiétant, qui a une forme de rage contenue dans le regard. Mais aussi une douceur et une mélancolie charmante.
Shaïn Boumedine est un comédien viscéral, qui apporte opacité, dureté, et vulnérabilité à Aïssa, ce qui permet de ne jamais tomber dans le cliché hagiographique.
Lubna Azabal a fait émerger chez Nadia une force, un courage, mais aussi une pointe de mauvaise foi culpabilisante, et une certaine cruauté. Elle me permet d'échapper au cliché de la mère éplorée pour construire un personnage bien plus complexe. Et surtout très loin des clichés de la femme arabe et musulmane. "
Merci à Memento films et au festival droles d'endroit pour des rencontres de Bron.