Critique- Une part manquante : ma fille ma bataille
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Dans Une part manquante, Guillaume Senez, à qui le thème de la paternité est le fil conducteur de ses longs métrages (Keeper ou le très beau Nos batailles), aborde un thème propre à la société japonaise, celle des couples binationaux dont l'un est privé de la garde de son enfant
Un sujet dont on parle de plus en plus dans les médias et qui a également nourri un beau roman d'Olivier Adam qui avait discuté avec nous sur ce sujet au moment de la sortie de ce livre.
Comme le héros de tout peut s'oublier, Jay, le personnage principal d'une part manquante doit vivre avec les conséquences de cette regle de droit japonaise selon laquelle en cas de séparation, le premier qui part avec l'enfant issu du mariage en a la garde
C'est ainsi que depuis 9 ans, ce français qui a aimé et épousé une japonaise est resté à Tokyo dans l'espoir de retrouver sa fille Lily. Il est chauffeur de taxi la nuit et le jour il accompagne dans ses démarches une mère dans la même situation que lui, à qui on a arraché l'enfant sans qu'elle puisse le voir.
Et un jour, une jeune fille entre dans son taxi. Il semble reconnaître Lily.
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Son existence austère est tout entière consacrée à croire aux retrouvailles avec Lily mais la rencontre avec la jeune fille va lui faire perdre toute retenue. Consciemment ou inconsciemment il va dépasser toutes les limites permises dans ce pays pour être avec sa fille.
Le film montre parfaitement, sans didactisme ni pathos l’étendue du problème et l’impasse administrative pour les étrangers voulant récupérer leur progéniture.
La détermination de ce père qui est resté au Japon pendant neuf ans et qui fait tout pour retrouver sa fille est admirable.
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Fidèle à sa façon de filmer- les comédiens n'ont pas de dialogue dans le scénario, juste le cadre de la situation et improvisent tout autour-, Guillaume Senez s'attache une nouvelle fois à décrire les liens familiaux et plus précisément ceux qui unissent un père à ses enfants.
Et son Japon loin des cartes postales - pas de cerisier en fleurs, simplement le ballet des néons dans une métropole qui ressemble à tant d'autres- rend le propos universel, malgré le particularisme de la règle de base.
Une part manquante sans doute son plus beau film de son auteur alors que les deux autres étaient déjà très beaux, sans doute , encore plus bouleversant. surtout dans la dernière demi heure, où toute la retenue et la rage que Jay avait contenu en lui s'effondrent face à l'inanité du système .
On est vraiment bouleversé par cette plongée sensible dans une paternité contrariée et contemporaine et le combat insensé et perdu d'avance que Jay doit mener.
Guillaume Senez réussit à sculpter des émotions qui nous habitent et nous transcendent.
En père obsessionnel, abattu et désespéré, Romain Duris est meilleur et plus déchirant que jamais. Judith Chemla apporte un contrepoids plus fantaisiste salutaire à ce drame familial et la jeune Mei Cirne Masuki est également formidable.
Un film puissant et profondément humain et le Kissing You de Des'ree pourrait résonner longtemps en vous.